Son nom et sa généalogie:
Il se nomme ‘Abdoullah Ibn Abi Qouhafa ‘Othman Ibn ‘Amir. Abou Bakri était le septième dans la descendance de taym, le fils de Mourra, le septième ancêtre du Prophète. Le clan auquel il appartenait se dénommait banû taym du nom de taym sa mère salmâ était une fille de l’oncle de son père, saqr. Le nom originel d’Abou Bakr avait été ‘Abdul ka ‘bah. Il s’appelait également ‘atîq. Sa mère n’avait aucun fils survivant, et lorsqu’elle avait mis au monde Abou Bakr, elle l’amena au temple et s’exclama : « Ô déité ! si celui-ci est immunisé contre la mort, alors donne-le moi« .
Sa naissance:
Il est né environ trois ans après l’année de l’éléphant.
Avant sa conversion:
Il faisait partie des notables du peuple de Quraychite et comptait parmi leurs savants, il était aimé parmi eux.
Sa conversion à l’Islam (-13 H. ; 37 ans):
Abou Dardâ a rapporté que le Messager d’Allah a dit : « N’allez-vous pas laisser tranquille mon compagnon ! N’allez-vous pas cessez, et laisser tranquille mon compagnon ! Lorsque je vous ai dit : » Ô peuple, je suis le Messager d’Allah auprès de vous ! Vous m’avez répondu : » Menteur ! « , sauf Abou Bakr qui, lui, m’a cru ! ». (al-Bakhari)
Le Prophète a dit : « Quand j’ai invité les gens à embrasser l’Islam, tous ont pris un temps de réflexion et d’hésitation, excepté Abou Bakr : il ne s’est pas retenu, et n’a pas hésité ! » (Ibn Ishaq)
‘Ali Ibn Abi Taleb a rapporté qu’Abou Bakr a été le premier homme musulman. (Ibn ‘Asâkir)
La libération de Bilal (-13 H ; 37 ans):
Il fut affranchi par Abou Bakr As-Siddiq qui l’avait racheté d’Umayya Ibn khalaf à neuf onces d’or. Ce dernier exagérait son prix afin de décourager Abou Bakr, tout en se disant toutefois : « Si Abou Bakr insiste à l’acheter à une seule once d’or, je le vendrai à ce prix« .
Tandis que Abou Bakr se disait : « S’il ne consent à la vente qu’au prix de cent onces d’or, je les payerai« .
Son émigration vers Médine en compagnie du Prophète (1 H. ; 51 ans):
Dès que le départ du Prophète fut signalé, les Qoraïshites se lancèrent sur ses traces et Aboutirent à l’entrée d’une grotte où le Prophète et son compagnon Abou Bakr s’étaient réfugiés… Allah troubla les Qoraïshites : les traces de pas menaient bien à cette grotte mais visiblement, elle n’était pas fréquentée. Plus bas, dans la grotte, Abou Bakr dit à son ami Muhammad : « Si l’un d’eux regarde sous ses pieds, il nous verra…«
Et le Prophète de répondre : « Que penses-tu de deux [personnes] dont Allah est le troisième ?«
Allah a dit : {Si vous ne lui portez pas secours… Allah l’a déjà secouru, lorsque les mécréants l’avaient banni, deuxième de deux. Quand ils étaient dans la grotte et qu’il disait à son compagnon : « Ne t’afflige pas, car Allah est avec nous. » Allah fit alors descendre sur lui Sa sérénité et le soutint de soldats que vous ne voyiez pas, et Il abaissa ainsi la parole des mécréants, tandis que la parole d’Allah eut le dessus. Et Allah est Puissant et Sage.} (9/40)
Quand ils furent débarrassés de leur poursuivants, le Prophète et Abou Bakr retrouvèrent leur guide Abdullah Ibn Uraïqit et le berger d’Abou Bakr, ‘Amir Ibn Fujaïrah, et continuèrent leur route. Ils passèrent à proximité de la tente d’une femme qu’on appelait Oum Ma’bad Al-Khozâ’iyyah. Les voyageurs étaient alors à bout de vivres. Ils demandèrent à Oum Ma’bad de leur vendre de quoi tenir le reste du trajet. Mais la femme, gênée, leur dit : « Par Allah, si j’avais de quoi vous donner, je vous l’aurais donné gratuitement ».
Le Prophète vit dans un coin une chèvre frêle. « Et cette chèvre ? », demanda le Prophète.
« Elle est frêle comme tu le vois« , répondit la femme.
Le Prophète lui demanda d’approcher la chèvre. Alors, le Prophète posa sa main sur la chèvre qui subitement prit des forces. Puis, il toucha son pis qui se remplit de lait. Le Prophète prit du lait de la chèvre et commença par donner à ses compagnons. Ensuite, il en donna à Oum Ma’bad, il remplit un bol destiné à Abou Ma’bad et il finit par en boire à son tour. Les voyageurs suivirent leur chemin. Quand Abou Ma’bad fut de retour, il s’étonna à la vue du bol de lait car il savait que leur chèvre ne donnait pas de lait. Alors, Oum Ma’bad lui décrivit le Prophète et lui raconta ce qu’il fit. Il lui dit : « C’est l’homme que Qoraïsh poursuit pour l’assassiner ». Oum Ma’bad et Abou Ma’bad embrassèrent l’Islam.
La bataille de Badr (2 H):
Anas dit : « Le Messager d’Allah consulta les gens à propos des captifs à Badr en disant : « Allah le Puissant, le Majestueux vous a fait triompher sur eux… »
‘Omar Ibn al-Khattab se leva et dit : « Ô Messager d’Allah, tranche leur le coup!«
Le Messager d’Allah se détourna de lui. Puis il reprit la parole : « Ô gens, Allah le Puissant, le Majestueux vous a fait triompher sur eux. Pourtant hier encore ils étaient vos frères..«
‘Omar Ibn al-Khattab se leva et dit : « Ô Messager d’Allah, tranche leur le coup! »
Le Messager d’Allah se détourna de lui encore et reprit les mêmes propos à l’adresse de ses compagnons.
Abou Bakr se leva alors et dit : « Ô Messager d’Allah, si tu penses devoir leur pardonner et accepter une rançon….«
Le vissage du Prophète fut débarrassé de l’expression de souci qui l’avait marqué, et il leur pardonna et accepta une rançon.
Puis Allah, le Puissant, le Majestueux révéla : {N’eût-été une prescription préalable d’Allah, un énorme châtiment vous aurait touché pour ce que vous avez pris (de la rançon)} (8/67) ». (Ahmad n°13143)
Son pèlerinage:
En revenant de TAbouk, le Prophète pensa au pèlerinage. Puis il dit : « Les Polythéistes font la circumambulation tout en étant complètement nus, je redoute le pèlerinage à cause d’eux ».
Il envoya Abou Bakr à la Mecque et le fit suivre de ‘Ali avec pour mission d’interdire désormais le pèlerinage aux polythéistes, et de leur accorder un délai de quatre mois pour se convertir, au bout duquel, la guerre serait déclarée entre eux et les Musulmans, s’ils ne se convertissaient pas.
Le Prophète fit accompagner Abou Bakr de trois cent Médinois, emportant vingt chameaux marqués en guise d’offrande. (Ibn Sa’di)
Récit de la mort du Prophète et discours d’Abou Bakr (11 H ; 61 ans):
‘Orwa Ibn Zoubayr, qu’Allah les agrée, rapporte : Abou Bakr revint alors du Sonh sur sa monture et s’arrêta devant la porte de la mosquée. Il vint, affligé et attristé, et demanda la permission d’entrer dans la maison de sa fille Aïcha et elle l’autorisa à entrer. Il entra, le Messager d’Allah était mort sur son lit et ses femmes étaient autour. Elles voilèrent leurs visages et se cachèrent d’Abou Bakr sauf Aïcha. Il découvrit le visage du Messager d’Allah et se pencha sur lui en l’embrassant et en pleurant. Il dit : « Ce que prétend Ibn Al-Khattab est faux. Le Messager d’Allah est bien mort, par celui qui tient mon âme dans sa main! Miséricorde d’Allah sur toi, Ô Messager d’Allah! Tu es si bon, vivant et mort ». Puis il le couvrit de son habit et sortit rapidement à la mosquée. Il passa au-dessus des épaules des gens et arriva au minbar. En le voyant venir, ‘Omar s’assit. Abou Bakr se leva à côté du minbar et appela les musulmans. Ils s’assirent et écoutèrent.
Abou Bakr prononça l’attestation de foi et fit une introduction très touchante. Puis il reprit : « Allah puissant et glorieux a annoncé à son Prophète sa mort alors qu’il était vivant et parmi vous, de même qu’il vous a annoncé votre mort. La mort est une vérité et il ne restera aucun parmi vous sauf Allah puissant et glorieux. Allah élevé a dit : {Mohammad n’est qu’un messager – des messagers avant lui sont passés. S’il mourait, donc, ou s’il était tué, retourneriez-vous sur vos pas ? Quiconque retourne sur ses pas ne nuira en rien à Allah; et Allah récompensera bientôt les reconnaissants} (3/144).
-Ce verset est dans le Coran?! S’exclama ‘Omar. Par Allah! Je ne savais pas avant ce jour que ce verset avait été révélé (j’étais inconscient de son sens)!
– Et Allah élevé, continua Abou Bakr, a dit à Mohammad, prière et paix sur lui : {En vérité tu mourras et ils mourront aussi} (39/30). Allah élevé dit aussi : {Tout ce qui est sur elle doit périr. Seule subsistera la face de ton Seigneur plein de majesté et de noblesse} (55/26-27). Il dit encore : {Toute âme goûtera la mort. Mais c’est seulement au jour de la résurrection que vous recevrez votre entière rétribution} (3/185). Allah a fait vivre Mohammad et l’a gardé jusqu’à ce qu’il établisse grâce à lui la religion d’Allah. Mohammad a fait triompher la volonté d’Allah, il a transmis la religion d’Allah et a combattu pour la cause d’Allah, puis il est mort en accomplissant cela. Il vous a laissés sur la voie; quiconque périra aura déjà reçu la preuve et le remède. Celui dont le Seigneur est Allah, Allah est vivant et ne meurt pas, et celui qui adorait Mohammad et le considérait comme un dieu, alors son dieu est mort. Musulmans! Soyez pieux envers Allah! Tenez à votre religion! Placez votre confiance en votre Seigneur! La religion d’Allah est inébranlable et la parole d’Allah est complète. Allah aidera celui qui l’aide et il fera triompher sa religion. Le livre d’Allah est parmi nous; il est la lumière et le remède; par lui, Allah a guidé Mohammad, prière et paix sur lui; il contient le licite et l’illicite. Par Allah! Peu nous importe les créatures qui se coalisent contre nous! Nos sabres sont dégainés, nous ne les avons pas encore déposés, et nous combattrons ceux qui nous contredisent comme nous avons combattu avec le Messager d’Allah, prière et paix sur lui. Pour cela que personne ne se lance dans la perdition! ». Puis les mouhajirins partirent avec lui voir le Messager d’Allah, prière et paix sur lui.
Discussion au sujet du Khalifa dans la cour:
Ibn ‘Abbâs, qu’Allah les agrée, rapporte : ‘Omar raconta : voilà ce qui s’est passé quand le Messager d’Allah mourut. On vint nous dire que les ançars s’étaient réunis dans la cour des Banou Saïda pour prêter serment à Saad Ibn ‘Oubèda, qu’Allah l’agrée. Je me suis levé précipitamment ainsi qu’Abou Bakr et Abou ‘Oubeyda Ibn Al-jarrah, qu’Allah les agrée. Nous craignîmes qu’ils ne causent un tort à l’Islam et nous partîmes les rejoindre. Nous rencontrâmes deux hommes véridiques des ançars : ‘Ouwaym Ibn Saïda et Maâan Ibn Ady, qu’Allah les agrée. Ils demandèrent : « Où allez-vous? »
Nous répondîmes : « Rejoindre votre tribu, à cause de ce qu’ils préparent ».
Ils proposèrent : « Retournez, car ils ne vous désobéiront pas et ne feront pas une chose que vous désapprouvez ».
Mais nous insistâmes pour partir. Je me mis à arranger des paroles que je voulais dire jusqu’à ce que nous arrivâmes. Ils étaient autour de Saad Ibn ‘Oubèda qui était malade et couché sur un lit. Quand nous entrâmes, ils prirent la parole et dirent : « Ô mouhajirins! Un émir des nôtres et un des vôtres! »
Je voulus parler mais il dit : « Écoute, ‘Omar Houbèb Ibn Almondhir dit : « C’est moi le stratège et le politicien hors pair! Par Allah! Si vous voulez, nous rallumerons la guerre! »
Abou Bakr dit : « Doucement! »
Il loua Allah et le félicita puis dit : « Ô ançars! Par Allah! Nous ne nions pas vos vertus, ni votre valeur dans l’Islam, ni nos devoirs envers vous. Mais vous savez bien que cette tribu, Quraychite, tient une place parmi les arabes qu’aucune autre tribu ne possède, et que les arabes ne se soumettront qu’à un homme d’entre eux. Nous serons donc les souverains et vous les ministres. Soyez pieux envers Allah! N’ébranlez pas l’Islam et ne soyez pas les premiers à causer du tort à l’Islam. Je vous propose un de ces deux hommes (moi et Abou ‘Oubeyda), lequel choisirez-vous, vous pourrez lui faire confiance ».
Par Allah! Il avait dit tout ce que je voulais dire, à part cette dernière parole. Par Allah! Je préfère être tué et être ressuscité, puis être tué encore et revivre, sans avoir commis de péché, plutôt que d’être le chef d’un groupe contenant Abou Bakr.
Puis je dis : « Ô ançars! Ô musulmans! La personne qui mérite le plus la place du Messager d’Allah après lui est le {Deuxième de deux quand ils étaient dans la grotte} (9/40) : Abou Bakr qui a de loin dépassé tous les autres ». Puis je pris sa main et un homme des ançars me précéda et tapa sur sa main avant moi. Puis les gens se suivirent et on laissa Saad Ibn ‘Oubèda.
Abou Bakr et ‘Omar se rejettent le califat dans la cour
Ibn Sirine rapporte : ce jour-là, Abou Bakr et ‘Omar, qu’Allah les agrée, rejoignirent les ançars.
Abou Bakr dit : « Ô ançars! Nous ne nions pas vos vertus, et aucun croyant ne nie vos vertus. Par Allah! Tout bien que nous avons atteint, vous y avez participé. Mais les arabes n’accepteront qu’un homme de Quraychite et ne resteront pas sous l’autorité d’un autre. Les Quraychites sont les meilleurs orateurs, ils ont les origines les plus nobles et la terre la plus noble, ils sont aussi les plus généreux parmi les arabes. Prêtez donc serment à ‘Omar!
– Non, répondirent-ils.
– Pourquoi donc? Questionna ‘Omar.
– Nous craignons d’être défavorisés.
– Tant que je vivrai, affirme-t-il, cela n’aura pas lieu. Prêtez donc serment à Abou Bakr.
– Tu es plus fort que moi, dit Abou Bakr à ‘Omar.
– Tu es meilleur que moi, répliqua ‘Omar.
– Tu es plus fort que moi, répéta Abou Bakr ».
‘Omar donna la même réponse. Abou Bakr répéta une troisième fois et ‘Omar répondit : « Ma force est à ton service en plus de ta supériorité ».
Ils prêtèrent alors serment à Abou Bakr, qu’Allah l’agrée. Quand on prêta serment à Abou Bakr, certaines personnes allèrent voir Abou ‘Oubeyda Ibn Aljarrah. Il rétorqua : « Vous venez vers moi alors que le {Deuxième de deux} (9/40) est parmi vous! »
Discours de ‘Omar et le serment collectif pour Abou Bakr (11 H ; 61 ans):
Anas raconte : j’ai entendu le deuxième discours de ‘Omar le lendemain de la mort du Messager d’Allah, prière et paix sur lui. Abou Bakr était silencieux et ne disait pas un mot. ‘Omar dit : « J’espérais que le Messager d’Allah vive jusqu’à ce qu’il soit le dernier d’entre nous à mourir. Mais si Mohammad est mort, Allah a mis parmi nous une lumière pour être guidés. Allah a guidé Mohammad et Abou Bakr est le compagnon du Messager d’Allah et le {Deuxième de deux} (9/40). Il est le musulman le plus digne d’être votre chef. Levez-vous donc et prêtez-lui serment (baya) ».
Un groupe lui avait déjà prêté serment dans la cour des Banou Saïda, et le serment public eut lieu alors sur le minbar. J’ai entendu ‘Omar dire à Abou Bakr à ce moment-là : « Monte sur le minbar ». ‘Omar ne cessa de le presser jusqu’à ce qu’il monta et les musulmans lui prêtèrent serment.
Son premier discours en tant que calife (11 H. ; 61 ans):
Après la mort du Messager d’Allah et l’élection de Abou Bakr comme calife, il a dit dans un de ses discours : « Allah a donné à Mohammed une certaine longévité jusqu’à ce qu’il a pu établir la religion d’Allah, fait triompher la parole d’Allah, transmis le Message et combattu pour Sa cause. Allah a recueilli son âme en cet état et en vous laissant sur ce chemin droit, donc celui qui périra, il périra averti. Quiconque considère qu’Allah est son Seigneur, qu’il sache qu’Allah est vivant et ne mourra pas. Quant à celui qui adore Mohammed et le prend pour divinité qu’il sache que celle-ci est morte. Ô hommes! Craignez Allah! Attachez-vous à votre religion et fiez-vous à votre Seigneur. La religion d’Allah est déjà établie, la Parole d’Allâh est parfaite, Allâh accorde la victoire à celui qui défend sa religion. Le Livre d’Allâh est entre nos mains, elle est la lumière et la guérison, par quoi Allâh a guidé Mohammed -que Allâh l’agrée-, et on y trouve le licite et l’illicite. Par Allâh! Nous ne soucions plus de ceux qui se rassemblent pour nous combattre. Les sabres d’Allâh sont dégainés et nous ne les avons pas encore mis dans leurs fourreaux. Nous combattrons ceux qui nous seront hostiles comme nous avons combattu à côté du Messager d’Allâh ». (Al-Bayhaqi)
La tentative de démission:
Ibn Rahawayh rapporte : quand il fut nommé calife, Abou Bakr s’assit tristement dans sa maison. ‘Omar entra chez lui et Abou Bakr se mit à lui faire des reproches.
Il lui dit : « C’est toi qui m’a fait porter cette responsabilité » et il se plaint de devoir juger entre les gens.
‘Omar lui dit : « Mais tu sais bien que le Messager d’Allâh a dit : si le gouverneur s’efforce et atteint la vérité, il a deux récompenses. Et s’il s’efforce et se trompe, il a une récompense ». Abou Bakr fut alors un peu soulagé.
Aboul Jahhaf rapporte : quand on prêta serment à Abou Bakr il s’enferma pendant trois jours. Il sortait chaque jour et disait : « Musulmans! J’ai annulé votre serment! Prêtez serment à qui vous voulez ». À chaque fois, ‘Ali Ibn Abou Tâlib lui répondait : « Nous n’acceptons pas ta démission et nous ne te démettons pas. Puisque le Messager d’Allâh t’a placé à l’avant, qui donc te fera reculer? »
Zayd Ibn ‘Ali rapporte : Abou Bakr, qu’Allâh l’agrée se leva sur le minbar du Messager d’Allâh et appela : « Y va-t-il une personne qui déteste que je sois émir pour que je démissionne? » Il répéta cela trois fois.
‘Ali Ibn Abou Tâlib se leva alors et répondit : « Non, par Allah! Nous n’acceptons pas ta démission et nous ne te démettons pas. Qui donc pourra te faire reculer alors que le Messager d’Allâh t’a placé à l’avant? »
L’une des premières choses qu’il fait en tant que calife est de régler les dettes que le Prophète n’a pu faire de son vivant (11 H. – 61 ans):
Selon Jabir, le Messager d’Allâh lui a dit : « Si les contributions du Bahrayn arrivaient, je t’en donnerais telle et telle chose ». Mais l’or du Bahrayn n’arriva pas jusqu’à la mort du Prophète. Quand cet or arriva enfin, le calife Abou Bakr cria à haute voix : « Que celui qui a une promesse du Messager d’Allâh ou auquel ce dernier doit quelque chose vienne à nous ».
Je vins à lui et lui dis : « Le Prophète m’a dit ceci et cela ». Il me donna alors une certaine somme. Je la comptai et voilà qu’elle représentait cinq cents (dinars ou dirhams).
Il me dit : « Prends-en encore le double ». (Al-Boukhâri, Mouslim)
Sa fermeté face aux apostats (11 H. ; 61 ans):
Abou Hourayra a dit : « Lorsque mourut le Messager d’Allâh , qu’Abou Bakr lui succéda et qu’un certain nombre de tribus arabes apostasièrent, ‘Omar a dit : « Comment combattrais-tu ces gens alors que le Messager d’Allâh a dit : « J’ai reçu l’ordre de combattre les gens jusqu’à ce qu’ils disent : « Il n’y a de dieu que Allâh », et celui qui l’a dit a mis à l’abri de moi ses biens et sa vie sauf pour ce qui en revient de droit à l’Islam, et c’est à Allâh de lui demander des comptes »?
Abou Bakr lui dit : « Par Allâh! Je combattrai sûrement tous ceux qui font une différence entre la prière et l’aumône légale car l’aumône est la redevance des biens. Par Allâh! S’ils refusent de me donner un bout de corde qu’ils donnaient au Messager d’Allâh, je les combattrai à cause de lui ».
‘Omar dit alors : « Par Allâh! Je ne tardai pas à comprendre que c’était Allâh qui avait fait choisir à Abou Bakr la solution du combat et j’ai su qu’il avait raison » ». (Al-Boukhâri, Mouslim)
Aïcha (ra) raconte : mon père partit sur sa monture en brandissant son sabre vers Dhoul Qasça. ‘Ali Ibn Abou Tâlib vint et attrapa les rênes de sa monture en disant : « Où vas-tu, calife du Messager d’Allah?! Je te dis comme t’a ordonné le Messager d’Allâh le jour d’Ouhoud : range ton sabre et ne nous cause pas la calamité de ta mort. Par Allah! S’il nous arrivait un malheur en ta personne, l’ordre de l’Islam ne sera jamais plus rétabli après toi ». Abou Bakr retourna alors et envoya l’armée.
La bataille de Mouta:
La première affaire que mena à bien Abou Bakr fut d’envoyer ‘Oussama Ibn Zayd accompagné d’une légion, avec l’ordre de se rendre du côté des terres de Mouta, là où mourut martyr son père Zayd Ibn Haritha.
Après la mort du Messager, la catastrophe devint grande, l’hypocrisie s’accrut, certaines tribus apostasièrent et certains refusèrent de verser la zakat, l’aumône obligatoire. Abou Bakr s’attacha alors à régler cette affaire primordiale, il ordonna d’équiper les troupes pour combattre les apostats et ceux qui refusaient de verser la zakat. Abou Bakr sortit avec l’armée et marcha jusqu’à arriver à Rabdhah qui est un village voisin de Médine à trois jours de Dhabi ‘Irq. Puis, il fut rappelé à Médine et y retourna ; il avait organisé onze légions pour combattre les apostats. Les armées se dirigèrent donc vers l’ennemi et combattirent les apostats. Mousaylama le menteur fut tué, et Toulayhah Ibn Khouwaylid s’enfuit vers la terre de Cham, il avait prétendu être Prophète, mais il se convertit par la suite à l’Islam à l’époque de ‘Omar Ibn al-Khattab. Parmi les compagnons, environ sept cents moururent martyrs, la plupart était de ceux qui connaissaient le Coran par cœur : parmi eux Zayd Ibn al-Khattab le frère de ‘Omar ainsi que Al-Bara Ibn Malik le frère de Anas Ibn Malik, parmi les Baní Hanifah, environ dix-sept mille hommes furent tués.
La compilation du Coran à l’époque de Abou Bakr :
Zayd Ibn Thâbit raconte : « ‘Omar était motivé à cause du nombre important de Houffadh (personnes ayant mémorisés le Coran) décédés. Déjà, à l’époque du Prophète, environ soixante-dix d’entre eux avaient déjà été fait martyrs à Birr Ma’ouna. Et plus tard, à l’époque de Abou Bakr, une expédition à Yamama contre les apostats coûta la vie à un nombre identique de Houffadh (en l’an 12 de l’hégire). Tout ceci fit réfléchir ‘Omar qui essaya de convaincre Abou Bakr avec succès ». (Al-Boukhâri)
Lorsque ‘Omar lui pria de porter une attention particulière à ce projet, il lui répondit : « Comment puis-je accomplir une chose que le Prophète n’a jamais fait ? » Cependant, lorsqu’il réalisa la sagesse et le besoin d’entreprendre un tel acte, il se résolut à le faire et soutint Zayd qui était lui-même hésitant.
C’est pour cette raison qu’Abou Bakr s’est adressé à lui en ces termes : « Tu es un jeune homme intelligent. Nous ne doutons pas de ton intégrité. De plus, tu écrivais les versets révélés au Prophète « .
La bataille de Dhât As-Salâsil (12 H. – 62 ans):
Dhât As-Salâsil fut la première grande confrontation armée entre les musulmans et les troupes de la Perse, sous le premier calife.
Elle eut lieu au terme des guerres contre les apostats, où les sassanides de Perse avaient prêté main forte à l’imposteur Mousaylama Al-Kadhdhâb.
Les troupes musulmanes comptaient 18 000 hommes sous le commandement de Khalid Ibn Al-Walid lorsqu’elles arrivèrent aux frontières de la Perse. Refusant d’embrasser l’islam et de verser le tribut, les chefs sassanides de la Perse durent affronter les musulmans dans cette bataille où ils enchaînèrent leurs soldats de peur que ceux-ci fuissent le combat. A peine les armes se rencontrèrent-elles que Khalid Ibn Al-Walid se débarrassa du commandant des troupes ennemies appelé Ormuzd, ce qui déclina le moral du reste des combattants. Ensuite, les musulmans ne tardèrent pas à remporter la victoire, prenant un part important sur le golfe Arabo-persique.
Son empoisonnement par les juifs de Khaybar (12 H. ; 62 ans):
Tabari a rapporté dans son Tarikha qu’Abou Bakr avait été invité à un repas par un des principaux chefs de la communauté juive de Khaibar ; le calife se trouvait à table avec Al Hadith Ibn Khaleda, qui était le médecin réputé des Arabes et on leur présenta un plat de riz.
Abou Bakr en mangea une bouchée, Al Harith en prit de même une bouchée mais la rejeta aussitôt en s’écriant : « Il y a dans ce riz un poison qui tue au bout d’une année ! »
La désignation de ‘Omar comme successeur au califat (13 H. ; 63 ans):
Lorsque Abou Bakr fut sous le coup de la maladie, il réunit auprès de lui Talhah, ‘Othman Ibn ‘Affan, ‘Abdou r-Rahman Ibn ‘Awf ainsi que d’autres parmi les grands compagnons et il les informa qu’il voyait ‘Omar Ibn Al-Khattab comme calife. Ils approuvèrent cela et firent l’éloge de son avis, puis il apparut devant les gens et les informa que ‘Oumar serait son successeur. Il leur ordonna de l’écouter et de lui obéir. Ensuite, il appela ‘Othman Ibn ‘Affan et lui dit : « Ecris ! » puis il lui ordonna de cacheter cet écrit avec le sceau du Messager d’Allâh, ce qu’il fit. Ensuite ‘Othman sortit avec le pli et le lut aux gens. C’est alors qu’ils prêtèrent serment à ‘Omar Ibn Al-Khattab et les gens furent satisfaits que ce soit lui leur calife.
Ensuite Abou Bakr convoqua ‘Omar avec lequel il s’isola en privé et lui dit : « Je t’ai désigné à ma succession, et je te recommande de craindre Allâh. Allâh n’exige que l’on s’acquitte de certains devoirs de nuit, qu’Il ne peut accepter que l’on retarde pour les accomplir de jour ! De même il y a des charges que l’on doit accomplir de jour, Allâh n’aime pas qu’on les retarde pour les exécuter de nuit ! Allâh n’accepte pas d’actes surérogatoires tant que l’on ne s’est pas acquitté de l’obligatoire qui est prioritaire ! Et si certains verront au Jour Dernier, leur balance pencher vers le bien, ce ne sera certes que grâce à leur attachement à la Vérité. Tandis que ceux dont les pesées seront légères ce sera parce qu’ils auront suivi les voies de l’égarement ; il est bien évident qu’une balance qui n’aura été chargée que de mauvais actes ne vaudra pas grand-chose.
Allâh a cité les gens du Paradis en les louant par les meilleurs actes qu’ils aient accompli, et Il leur a pardonné leurs erreurs. Si tu les cite à ton tour dis-toi : « J’ai peur de ne pas être parmi eux! »
De même Allâh a parlé des gens de l’Enfer, et Il leur a rappelé ce qu’ils commettaient. Lorsque tu te souviens d’eux, demande à ne pas être de ceux-là. Ne te rappelles pas uniquement des versets où il n’est question que de la Miséricorde d’Allâh, mais souviens toi en même temps des versets qui parlent de Son Châtiment pour que tu sois de ceux qui craignent Allâh et espèrent en Lui. Pour que tu sois quelqu’un qui ne demande d’Allâh que ce qui est conforme à la Vérité, et ne se jette point dans les chemins de la perdition!
Si tu prends en considération mes recommandations, fait alors en sorte que le meilleur absent que tu souhaites rencontrer soit la mort, car elle va te rejoindre ; mais si tu négliges ce que je t’ai recommandé, la mort sera cet absent que tu n’aimes pas rencontrer, alors, qu’en vérité, tu ne pourras point la fuir! «
Quand ‘Omar sortit, Abou Bakr leva les mains au ciel et invoqua Allâh en disant : « Seigneur, je n’ai voulu par cette décision que le bien des musulmans, pour les préserver de tout désordre (fitna) c’est pourquoi j’ai agi selon ce que TU sais mieux que quiconque, et j’ai fait de mon mieux pour faire le bon choix ; j’ai donc désigné à leur tête le meilleure d’entre eux, le plus capable parmi eux pour s’acquitter de cette charge, celui qui est le plus attentif et le plus sage. Voilà que Ta décision en moi s’accomplit (par la mort) : Sois Celui Qui les prendra en charge, car ils sont Tes serviteurs ; leur volonté est entre Tes Mains. Seigneur, réforme en rien leur tuteur fais en sorte qu’il soit parmi tes « califes bien guidés » et réforme pour lui ses sujets ».
Sa mort (13 H ; 63 ans):
Sa maladie survint le lundi sept du mois de Joumâdâ en l’an 13 de l’Hégire, dura 15 jours, et il mourut le mardi à l’heure de la prière du soir, huit jours avant la fin du mois.
La mort d’Abou Bakr As-Siddiq eut lieu la treizième année, la nuit du mardi précédant les sept derniers jours du mois de Joumâdâ Al-‘Akhirah, à l’âge de soixante-trois ans.
Son califat dura deux ans, trois mois et treize jours (ou sept jours de moins).
Ce qu’Abou Bakr dit au moment de sa mort à ‘Abderrahmane Ibn ‘Awf
‘Abderrahmane Ibn ‘Awf rapporte : Abou Bakr, As-Siddiq me dit au moment de sa mort : « Je ne regrette rien à part trois choses que j’ai faites, et j’aurais voulu ne pas les avoir faites, et trois autres choses que je n’ai pas faites, et j’aurais voulu les avoir faites, et trois autres choses que j’aurais voulu demander au Messager d’Allah, prière et paix sur lui ».
Parmi ces choses, il dit : « J’aurais voulu, le jour de la cour des Banou Saïda, lancer le califat à l’un de ces deux hommes : Abou ‘Oubeyda ou ‘Omar. Il aurait était émir et j’aurais été ministre ».
Il dit aussi : « J’aurais voulu, quand j’ai envoyé Khalid au Cham, envoyer ‘Omar en Irak. J’aurais ainsi étendu mes mains à droite et à gauche dans la voie d’Allah. Quant aux trois que j’aurais voulu demander au Messager d’Allâh j’aurais voulu lui demander à qui doit revenir le califat, ainsi personne ne le disputera au calife. J’aurais aussi voulu lui demander si les ançars y ont droit. J’aurais enfin voulu le questionner sur l’héritage de la tante maternelle et de la nièce par la sœur, car j’ai un doute là-dessus ».
Alors qu’Abou Bakr agonisait il se découvrit le visage et dit à sa fille ‘Aicha (ra) qui était affligée : »Ne sois pas dans cet état mais récite plutôt : {Et puis voici le vertige de la mort, dévoilant du coup la vérité. Voilà Homme ce que tu cherchais à fuir !} (50/19)
Abou Bakr dit ensuite : « Prenez ces deux habits, lavez les, et utilisez les pour mon linceul; car les vivants ont plus besoin du neuf que le mort ! ».
Le lavage de son corps et son enterrement:
Sa femme Asma Binta ‘Oumaïss et son fils ‘Abd Arrahman se chargèrent du lavage rituel de son corps. Selon At-Tabari ‘Omar Ibn Al Khattab ordonna qu’on l’enterra immédiatement. Il fut enterré à côté de la tombe du Prophète d’Allâh dans la chambre personnelle (chouqqa) du Messager d’Allâh. ‘Omar, Talhah et ‘Abd Arrahman (le fils d’Abou Bakr) descendirent dans la tombe et y placèrent le corps.
Sa description physique:
Il était blanc de visage, le corps fin, les favoris non fournis, le front proéminent
Ses mérites:
On rapporte au sujet de Abou Moussa Al-Ach’ari qu’il dit : « Je serai aujourd’hui le portier du Messager d’Allâh« .
A ce moment arriva Abou Bakr qui poussa la porte. Je dis : « Qui va là? »
Il dit : « Abou Bakr ».
Je lui dis : « Attends un peu ».
Puis je m’en allai et dis : « Ô Messager d’Allâh! Voilà Abou Bakr qui demande l’autorisation d’entrer ».
Il dit : « Laisse-le passer et annonce-lui le Paradis ».
Je retournai auprès de Abou Bakr et lui dis : « Tu peux entrer et le Messager d’Allâh t’annonce le Paradis ». (Al-Boukhâri, Mouslim)
Selon Abou Hourayra, le Messager d’Allâh a dit : « Celui qui réunit deux bonnes actions au service d’Allâh, s’entend appeler à partir des portes du Paradis : « Ô esclave d’Allâh! Voilà une bonne chose que tu viens de faire ». Celui qui fait partie des pratiquants fervents de la prière est appelé à partir de la porte de la prière. Celui qui fait partie des volontaires fervents à la guerre sainte est appelé à partir de la porte de la guerre sainte. Celui qui fait partie des pratiquants fervents du jeûne est appelé à partir de la porte dite « du Rayyan » et celui qui fait partie des dispensateurs fervents d’aumônes est appelé à partir de la porte de l’aumône ». Abou Bakr dit : « Ô Messager d’Allâh! Que mon père et ma mère te servent de rançon! Il suffit d’être appelé à partir de l’une de ces portes pour être sûr du succès (d’entrer au Paradis)? Est-il possible que quelqu’un soit appelé à partir de toutes ces portes à la fois? »
Il dit : « Oui et j’ai bon espoir que tu sois l’un d’eux ». (Al-Boukhâri, Mouslim)
Le Messager d’Allâh a dit : « S’il m’avait été permis d’avoir pour ami intime quelqu’un d’autre que Allâh, cela aurait été Abou Bakr. Seulement il est mon frère et mon compagnon ». (al-Boukhâri)
Le Prophète a dit : « Abou Bakr et Omar seront les guides de tous les hommes adultes au Paradis : du premier au dernier ; sauf les Prophètes et messagers d’Allah ». (Tirmidhi, Ibn Mâja, Ibn Sa’di, Ahmad)
Le Messager d’Allâh a dit : « Certes, Abou Bakr, tu seras le premier individu de ma communauté à entrer au Paradis ! ». (Abou Dawoud et Al Hakim)
Houdhayfa a rapporté que le Prophète a dit : « Prenez exemple sur ceux qui viendront après moi : Abou Bakr et ‘Omar ! ». (Tirmidhi et Al-Hakim)
‘Aïcha a rapporté que l’envoyé d’Allâh a dit : « Il ne peut être question, lorsqu’Abou Bakr est présent dans un groupe, que ce soit quelqu’un d’autre qui dirige la prière ! ». (at-tirmidhi)
D’après Ibn ‘Omar, le Prophète a dit à Abou Bakr : « Tu étais mon compagnon dans la caverne, et tu seras mon compagnon près du Bassin (au jour de la Résurrection) ». (at-tirmidhi)
Abou Houraïra a rapporté que le Messager d’Allâh a dit : « Toute personne qui m’a prêté main forte, j’ai pu l’en récompenser, excepté Abou Bakr : il a eu pour moi tant de bienfaits, que seul Allâh saura l’en récompenser au Jour du Jugement dernier, et en vérité, il n’y a pas d’argent qui m’ait été aussi utile, comme l’a été l’argent d’Abou Bakr ! ». (at-tirmidhi)
Zayd Ibn Aslam a rapporté de son père qui a dit : J’ai entendu ‘Omar Ibn al-Khattab dire : Le Messager d’Allâh (Prière et salut d’Allâh sur lui) a ordonné de donner l’aumône, et il se trouvait que j’avais une somme d’argent. Alors je me suis dit : Aujourd’hui, je ferai mieux qu’Abou Bakr, si j’arrive un jour à rivaliser avec lui. J’ai fait don de la moitié de ma richesse.
Le Messager d’Allâh (Prière et salut d’Allâh sur lui) m’a demandé : Qu’as-tu laissé pour ta famille ?
J’ai dit : J’ai laissé l’équivalent de ce que j’ai donné.
Mais Abou Bakr avait apporté toute sa richesse et le Messager d’Allâh (Prière et salut d’Allâh sur lui) lui a demandé : Qu’as-tu laissé pour ta famille?
Il a répondu : Je lui ai laissé Allâh et Son Messager.
J’ai dit : Je ne rivaliserai plus jamais avec toi en quoi que ce soit.
Selon ‘Abderrahmane Ibn Abi Bakr As-Siddiq, son père dit une fois à ses invités : « Mangez en toute tranquillité. Moi, par Allâh, je n’y goûterai pas ». (Il craignait que le repas ne suffise pas à tout le monde).
‘Abderrahmane dit : « Par Allâh, toutes les fois qu’on en prenait une bouchée, le volume du dîner augmentait par sa base si bien qu’ils ont mangé à satiété et le manger était encore plus copieux qu’au départ. Abou Bakr regarda le manger et dit à sa femme : « Ô sœur des béni Firas! Qu’est-ce donc que cela? »
Elle dit : « Par tout ce que j’aime, voilà donc que notre dîner est trois fois plus abondant qu’au début ».
(Devant cette abondance inattendue) Abou Bakr se décida enfin à manger avec eux en disant : « Le serment que j’avais fait de ne pas manger n’était qu’une inspiration du Diable ».
Il en prit une bouchée puis porta le plat au Prophète et le manger se trouva ainsi chez lui. Or juste en ces temps expira le terme d’une trêve entre nous et certaines tribus. Douze hommes des nôtres arrivèrent chacun avec ce qu’il avait pu mobiliser comme hommes (pour reprendre le combat contre ces tribus), Tous purent en manger à leur faim ». (Al-Boukhâri, Mouslim)
Ibn Kathîr a dit : « Abou Bakr était le plus savant dans le Livre d’Allâh parmi les compagnons, car il est arrivé au Messager d’Allâh de le désigner pour diriger la prière à sa place, or le Messager d’Allâh a dit par ailleurs : « Celui qui guide les autres dans la prière doit être le plus savant d’entre eux ».
Ali
Son nom et sa généalogie:
Il se nomme Abou l-Haçan ‘Ali Ibn Abi Tâlib Ibni ‘Abdi l-Mouttalib Ibni Hachim Ibni ‘Abdi Manaf. C’est le cousin paternel du Messager d’Allah. Sa mère est Fatima Binta ‘Asad Ibni Hachim.
Sa naissance:
Il est né dix ans avant que le Prophète ne reçoive la révélation.
Son enfance:
Tabari, nous dit que, voyant toutes les difficultés dans lesquelles Abû-Tâlib se trouvait à cause de la famine pour entretenir une grande famille, Muhammad se rendit chez `Abbâs, un autre oncle, qui était plus riche, et lui dit : « Abou Tâlib a beaucoup de difficultés en ce moment; il serait charitable de prendre un de ses enfants chez toi, comme moi je vais le faire ». Ja’far fut ainsi adopté par `Abbâs, et `Ali par Muhammad. Il fut éduqué entre les mains du Prophète et dans sa maison. Il était surnommé « Haydara » comparativement au lion mais le Prophète l’avait surnommé « Abou Tourab » le père de la terre, c’est le surnom qu’il préférait.
Sa conversion:
Il est le premier à être entré en Islam après Khadija alors qu’il était jeune.
Son assistance au Prophète dès le début de l’Islam (-10 H. ; 10 ans):
‘Ali a fait ce récit : « Quand le verset : {Et prévient ta proche tribu} a été révélée, le Messager d’Allâh m’a appelé et a dit : « Ali, certainement Allâh a commandé que je prévienne ma proche tribu, et je sens la difficulté de cette mission. Je sais que quand je les affronterai avec cet avertissement, je n’aimerai pas leur réponse ». Alors le Prophète a invité les membres de son clan pour dîner avec lui sur une petite quantité de nourriture et peu de lait. Il y en avait quarante d’entre eux. Après qu’ils avaient mangé, le Prophète leur a parlé : « Ô Enfants d’Abdul Mouttalib, par Allâh, je ne connais pas de jeune homme venant des Arabes qui a apporté à son peuple mieux que je ne vous apporté. Je vous ai apporté la bonté de ce monde et de l’Au-delà. Le Tout-puissant a commandé que je vous invite à lui. Qui parmi vous m’aidera dans cette mission et deviendra mon frère, mon exécuteur testamentaire, et mon successeur ? »
Personne n’accepta l’invitation, et j’ai (‘Ali) dit : « Ô Messager d’Allâh, je serai votre assistant ».
Il a tenu mon cou et leur dit : « Celui-ci est mon frère, mon exécuteur testamentaire, mon successeur parmi vous. Ainsi écoutez-le et obéissez-lui ».Ils rirent et dirent à Abou Tâlib : « Il (Muhammad) vous a commandé d’écouter votre fils et de lui obéir » ». (Tabari, Ibn Athir 2/62, Ibn Asâkir 1/85, As-Souyouti dans Dur al-Manthur 5/97, al-Bayhaqi dans Dalail al-Nabawiya 1/428 et 430, et Ibn Ishaq)
Son remplacement du Prophète lors de l’hégire, et sa propre hégire ensuite:
Lorsque le Prophète fit l’Hégire de La Mecque à Médine, il ordonna à ‘Ali de passer la nuit dans son lit, de rester là-bas trois jours pour rendre à leurs propriétaires les dépôts confiés au Prophète et de le rejoindre ensuite à Médine. Il émigra de La Mecque à Médine à pied.
Son mariage avec Fátima (2 H. ; 21 ans):
‘Ali, le fils d’Abou Tâlib, rassembla alors son courage et vint demander sa main au Prophète. En présence du Prophète pourtant, il se laissa intimider et perdit sa langue. Il ne quitta pas le sol des yeux et ne put dire un mot.
Le Prophète lui demanda alors : « Pourquoi es-tu venu ? As-tu besoin de quelque chose ?«
‘Ali ne pouvait toujours pas parler alors le Prophète suggéra : « Peut-être es-tu venu pour demander Fatima en mariage ? « Oui » répondit ‘Ali
Selon ce qu’on rapporte, le Prophète dit simplement : « Bienvenue dans la famille » et cela fut pris comme l’approbation du Prophète par ‘Ali et par les Ansars qui l’attendaient dehors.
On rapporte aussi que le Prophète approuva et demanda à ‘Ali s’il avait quelque chose à donner en dot. ‘Ali répondit que non. Le Prophète lui rappela qu’il avait un bouclier qu’il pouvait vendre.
Ali vendit le bouclier à ‘Othman pour quatre dirhams et pendant qu’il se dépêchait de retourner chez le Prophète pour lui remettre la dot, ‘Othman l’arrêta et lui dit : « Je te rends ton bouclier comme cadeau de ma part pour ton mariage avec Fatima « .
Fatima et ‘Ali se marièrent donc probablement au début de l’an 2 de l’Hégire. Elle avait environ 19 ans à ce moment, et ‘Ali en avait environ 21.
Le Prophète lui-même dirigea la cérémonie du mariage. Pour le repas de noce, on servit aux invités des dattes, des figues et une mixture de dattes et de beurre gras appelé hais. Un membre dirigeant des Ansars offrit un bélier et d’autres firent des dons de céréales.
Pour son mariage, on rapporte que le Prophète offrit à Fâtima et à ‘Ali un lit de bois entrelacé de feuilles de palmes, une couverture de lit en velours, un coussin en cuir rempli de fibres de palmes, une peau de mouton, une marmite, une outre en peau et une meule manuelle pour moudre le grain.
Dans l’humble demeure d’Ali il y avait seulement une peau de mouton en guise de lit. Le matin qui suivit la nuit de noces, le Prophète vint chez ‘Ali et toqua à la porte. Barakah sortit et le Prophète lui dit : « Ô Oum Ayman ? Appelle mon frère pour moi«
« Ton frère ? C’est celui à qui tu as marié ta fille ? » demanda Barakah de façon quelque peu dubitative comme si elle se demandait : « Pourquoi le Prophète appelle ‘Ali son frère ? »
Il faisait référence à ‘Ali comme son frère seulement parce que faisant partie des musulmans qui se joignirent à la fraternité après l’hégire, le Prophète et ‘Ali était donc liés comme des frères.
Le Prophète répéta ce qu’il venait de dire à plus haute voix. ‘Ali vint et le Prophète fit une invocation, invoquant les bénédictions d’Allâh sur lui. Puis il demanda Fâtima. Elle arriva se faisant presque toute petite, dans un mélange de respect et de timidité et le Prophète lui dit : « Je t’ai marié à la personne de ma famille qui m’est le plus cher », de cette façon il cherchait à la rassurer. Elle ne commençait pas à vivre avec un parfait étranger mais avec quelqu’un qui avait grandi dans la même famille, qui était l’un des premiers à être devenu musulman à un jeune âge, qui était connu pour son courage, sa bravoure et sa moralité, et que le Prophète décrivait comme « son frère dans ce monde et dans l’au-delà ».
Ses enfants avec Fâtima :
Il eut d’elle 4 enfants : al Hasan, al Hussein, zaynab al kubra, et Oum kalthum al kubra.
Il n’épousa aucune autre femme durant la vie de Fâtima, après elle il épousa
– khawla Bint Ja’far ben qis (il a 1 fils Muhammad al Akbar)
– layla bint mas’oud (2 fils, ‘ubaid allah et abu bakr)
– oum al banin bint hazzam (4 fils, al ‘abbas al akbar, ‘uthman, ja’far et ‘abdullah)
– asma bint ‘amis (2 fils yahya et ‘awn)
– oum habib bint rabî’a (1 fils ‘Omar al akbar et 1 fille rouqayya)
– amamat bint abi l-‘as (1 fils muhammad al awsat)
– oum said bint ‘ourwa (2 filles oum al hasan et ramlat al kubra)
– muhayyat fille de amri qis (des filles : um hani, maymuna, zeinab asughra, ramla asughra, um kathum as sughra, fatima, umamat, khadija, um al kiram, um salam, um ja’far, jumana, naqisat et une fille qui n’a pas eu de nom)
La bataille d’Ouhoud (3 H ; 22 ans):
L’homme qui commença la bataille d’Ouhoud s’appelait Talhah bin Abi Talha, un grand guerrier de l’armée d’Abou Soufyân. Il s’engagea dans le champ de bataille et défia les Musulmans à se battre un contre un. Le défi fut accepté par ‘Ali et en moins de deux le corps inerte de Talha gisait sur le sol. L’étendard fut pris par deux de ses frères, mais les deux furent abattus par les flèches des Musulmans.
Neuf Mecquois prirent l’étendard, l’un après l’autre, mais chacun d’eux fut envoyé en enfer par ‘Ali. Ensuite, un soldat Ethiopien du nom de Sawaab s’avança sur le champ. Il avait un visage effrayant et en le voyant aucun Musulman n’osa avancer. Cet homme fut tué par ‘Ali d’un seul coup.
Il est choisi pour porter l’étendard des musulmans le jour de la bataille de Khaybar (7 H ; 26 ans)
Selon Abou Hourayra, le Messager d’Allâh a dit le jour de la bataille de Khaybar : « Je donnerai certainement la bannière à un homme qui aime Allâh et Son Messager. Allâh donnera par lui Sa victoire ».
‘Omar dit : « Je n’ai jamais aimé le commandement sauf ce jour-là ».
Je me suis donc précipité à l’avant dans l’espoir d’être appelé à porter l’étendard. Mais le Messager d’Allâh appela ‘Ali Ibn Abi Tâlib et lui donna la bannière en lui disant : « Marche sans te retourner jusqu’à ce que Allâh te donne la victoire »
‘Ali se mit en marche puis s’arrêta un moment sans se retourner et cria : « Ô Messager d’Allâh! A propos de quoi dois-je combattre ces gens? »
Il dit : « Combats-les jusqu’à ce qu’ils attestent qu’il n’y a de dieu que Allâh et que Mohammad est le Messager d’Allâh. Dès qu’ils font cela, ils ont mis à l’abri (de toi) leur sang et leurs biens sauf pour ce qui est de leurs redevances légales et c’est uniquement à Allâh de leur demander des comptes » ». (Mouslim)
Il est chargé d’intercepter une lettre lors de la conquête de la Mecque (8 H ; 27 ans):
Hateb ben Abi Baltaâ voyant tout ce qui se passait, écrivit une missive pour les Chefs Qoraïshites afin de les prévenir de l’attaque des Musulmans.
Ali raconte : « Le Prophète nous convoqua Al Miqdad, Az Zoubayr et moi et nous dit : « Allez à Radwat Khakh où vous rencontrerez une femme portant une lettre, prenez lui cette lettre ! » ».
Nous partîmes au galop et à l’endroit désigné, nous rencontrâmes une femme et nous lui demandâmes de nous remettre la lettre qu’elle portait. Elle nous répliqua qu’elle ne portait point de lettre. Nous la menaçâmes de la fouiller si elle ne nous montrait pas la lettre. Elle la sortit de ses cheveux, où elle la tenait cachée. Nous retournâmes à Médine et nous remîmes la lettre au Messager d’Allâh. Le Prophète lut la lettre qui contenait des informations sur les plans de l’expédition. Le Prophète fit venir Hateb et lui dit « Qu’as-tu fait ? ».
Hateb répondit : « Je n’ai fait cela non dans le but de te trahir ou de renier l’Islam mais uniquement pour que ma famille restée à la Mecque obtiennent une protection de la part des Quraychites ».
Il est choisi pour garder Médine pendant la bataille de TAbouk (9 H ; 28 ans):
Après le départ du Prophète, les Hypocrites, s’évertuèrent à se moquer de ‘Ali en lui disant que le messager d’Allâh l’avait laissé derrière lui pour porter son fardeau. Voulant se démontrer que les Hypocrites disaient là des mensonges, ‘Ali décida d’aller voir le Prophète. Lorsqu’il rejoignit ce dernier à Jaraf, il lui expliqua la raison de sa venue et la moquerie des Hypocrites.
Le Prophète lui dit : « Les Hypocrites sont des menteurs. Je suis venu ici après t’avoir désigné comme mon député. Ô ‘Ali! N’es-tu pas content que ton grade soit monté! Tu es à moi ce que Haroun fut à Mûsâ, à cette différence près qu’il n’y aura pas de Prophète après moi».
Après cette explication, ‘Ali retourna à Médine et le Prophète se dirigea vers TAbouk qui se trouvait à une distance de dix étapes de Damas et de Médine à la fois, et sur la frontière de l’Empire romain de l’époque.
Son pèlerinage:
En revenant de TAbouk, le Prophète pensa au pèlerinage. Puis il dit : « Les Polythéistes font la circumambulation tout en étant complètement nus, je redoute le pèlerinage à cause d’eux ».
Il envoya Abou Bakr à la Mecque et le fit suivre de ‘Ali avec pour mission d’interdire désormais le pèlerinage aux polythéistes, et de leur accorder un délai de quatre mois pour se convertir, au bout duquel, la guerre serait déclarée entre eux et les Musulmans, s’ils ne se convertissaient pas.
Il est rapporté que ‘Ali récita aux Polythéistes des versets de la sourate « Le repentir » (9) le jour de Arafat en ajoutant : « Après cette année, aucun polythéiste ne pourra plus tourner nu autour de la Ka’ba, que seuls les Croyants entreraient au Paradis. Que celui qui a conclu un pacte avec l’Envoyé d’Allâh sache que la durée de ce pacte ne dépasse pas les quatre mois, après l’écoulement de cette période, Allâh et Son Prophète désavoueront les polythéistes. C’est bien là ce que Allâh voulait dire par ce verset : {Proclamation d’Allâh et de Son Prophète adressée aux hommes le jour du pèlerinage : « Allâh et Son Prophète désavouent les polythéistes. Si vous vous repentez, ce sera un bien pour vous ; mais si vous vous détournez, sachez que vous ne réduirez pas Allâh à l’impuissance ». Annonce un châtiment douloureux aux incrédules} » (9/1~3).
L’hommage que lui rends le Prophète lors de son pèlerinage d’adieu (10 H. ; 29 ans):
Dans son pèlerinage d’adieu, et en la présence de plus de cent mille pèlerins au lieu dit de Ghadir Khum, le Messager d’Allâh a déclaré : « N’ai-je pas plus de droit sur les croyants qu’ils n’ont sur eux même ? »
Les gens ont pleuré et ont répondu : « Oui, Ô Messager d’Allâh ».
Alors le Prophète a levé la main de ‘Ali et a dit : « De quiconque je suis son Maître, ‘Ali est son Maître. Ô Allâh, aimez ceux qui l’aiment, et soyez hostile à ceux qui lui sont hostile ». (At-Tirmidhi, Ibn Mâja, Ahmad, Al-Hakim, An-Nasâi, Al-Haythami, Abôu Nou’aym, et At-Tabarani)
Lors de la maladie de mort du Prophète , il le trouve proche de la guérison
Selon Ibn ‘Abbâs, ‘Ali sortit de chez le Messager d’Allâh au cours de sa maladie qui a été suivie de sa mort. Les gens lui dirent : « Ô Abou Hasan! Comment va ce matin le Messager d’Allâh? »
Il dit : « Il est ce matin, par la grâce d’Allâh, tout près de la guérison« . (Al-Boukhâri)
Abou Bakr s’excuse d’avoir accepté le califat et ‘Ali et Zoubayr affirment qu’il en est le plus digne (11 H)
Sa’di Ibn Ibrahim Ibn ‘Abdarrahmân Ibn ‘Awf rapporte : ‘Abdarrahmân Ibn ‘Awf était avec ‘Omar Ibn Alkhattab quand Mouhammad Ibn Maslèma cassa le sabre de Zoubayr Ibn Al-‘Awwâm, qu’Allâh l’agrée. Puis Abou Bakr As-Siddiq se leva, sermonna les musulmans et s’excusa auprès d’eux en disant : « Par Allah! Jamais je n’ai voulu être émir, même pas un seul jour ou une seule nuit. Je ne l’ai jamais désiré et je ne l’ai jamais demandé à Allah, publiquement ni secrètement, mais j’ai craint la zizanie. Être émir n’est pas pour moi un soulagement, mais on m’a fait porter une responsabilité immense. Je n’ai pas la capacité ni les moyens de l’assumer sauf si Allâh puissant et glorieux me fortifie. J’aurais voulu que la personne la plus capable de l’assumer soit à ma place en ce jour ». Les mouhajirins acceptèrent ses paroles et ses excuses. ‘Ali et Zoubayr, qu’Allâh les agrée, déclarèrent : « Nous avons été fâchés uniquement parce que nous n’avons pas assisté à la concertation, mais nous savons qu’Abou Bakr est la personne qui le mérite le plus après le Messager d’Allah, prière et paix sur lui. C’est lui le compagnon dans la grotte et le {Deuxième de deux} (9/40), nous connaissons bien ses vertus et son âge. De plus, de son vivant, le Messager d’Allâh lui a ordonné de diriger la prière ».
Ce qui se passa entre ‘Ali et Abou Soufyân au sujet du califat d’Abou Bakr (11 H):
Souwèyd Ibn Rafla rapporte : Abou Soufyân entra auprès de ‘Ali et ‘Abbâs, qu’Allâh les agrée, et dit : « Ali! Et toi, ‘Abbâs! Comment se fait-il que le pouvoir soit pris par le clan le plus vil et le moins nombreux de Quraychite?! Par Allah! Si tu veux, je lui enverrai (à Abou Bakr) une troupe immense de cavaliers et d’hommes ».
‘Ali répondit : « Non, par Allah! Je ne veux pas que tu lui envoies une troupe immense de cavaliers et de soldats. Si nous n’avions pas considéré qu’Abou Bakr en fût digne, nous ne l’aurions pas laissé prendre le pouvoir. Abou Soufyân! Les croyants sont des gens qui se veulent le bien et qui sont compatissants les uns avec les autres, même si leurs demeures et leurs personnes sont éloignées. Les hypocrites, par contre, sont des gens qui se trompent les uns les autres même si leurs demeures et leurs corps sont proches. Nous avons prêté serment à Abou Bakr et il en est digne ».
Ibn Abjèr rapporte : quand on prêta serment à Abou Bakr As-Siddiq, Abou Soufyân vint voir ‘Ali et dit : « Comment la plus vile famille de Quraychite a-t-elle pu vous prendre le pouvoir?! Par Allah! Je vais leur envoyer une immense armée de chevaux et d’hommes si tu veux ».
‘Ali répliqua : « Tu es encore l’ennemi de l’Islam et des musulmans?! Cela ne nuira en rien à l’Islam et aux musulmans. J’ai considéré qu’Abou Bakr en était digne ».
Morra Attayyib rapporte : Abou Soufyân Ibn Harb vint chez ‘Ali Ibn Abou Tâlib et dit : « Comment se fait-il que le pouvoir est pris par le clan le moins nombreux et le plus vil de Quraychite (il voulait dire Abou Bakr)? Par Allah! Si tu veux, je lui enverrai une immense armée de cavaliers et d’hommes ».
‘Ali répliqua : « Abou Soufyân! Tu as longtemps été l’ennemi de l’Islam et des musulmans, et cela n’a nui en rien à l’Islam. J’ai considéré qu’Abou Bakr en était digne ».
‘Ali répond à Abou Bakr : « Nous n’acceptons pas ta démission et nous ne te démettons pas »
Aboul Jahhaf rapporte : quand on prêta serment à Abou Bakr il s’enferma pendant trois jours. Il sortait chaque jour et disait : « Musulmans! J’ai annulé votre serment! Prêtez serment à qui vous voulez ». À chaque fois, ‘Ali Ibn Abou Tâlib lui répondait : « Nous n’acceptons pas ta démission et nous ne te démettons pas. Puisque le Messager d’Allâh t’a placé à l’avant, qui donc te fera reculer? »
Zayd Ibn ‘Ali rapporte : Abou Bakr, qu’Allâh l’agrée se leva sur le minbar du Messager d’Allâh et appela : « Y va-t-il une personne qui déteste que je sois émir pour que je démissionne? » Il répéta cela trois fois.
‘Ali Ibn Abou Tâlib se leva alors et répondit : « Non, par Allah! Nous n’acceptons pas ta démission et nous ne te démettons pas. Qui donc pourra te faire reculer alors que le Messager d’Allâh t’a placé à l’avant? »
Il conviant Abou Bakr de ne pas sortir en personne pour le combat (11 H):
Aïcha raconte : mon père partit sur sa monture en brandissant son sabre vers Dhoul Qasça. ‘Ali Ibn Abou Tâlib vint et attrapa les rênes de sa monture en disant : « Où vas-tu, calife du Messager d’Allah?! Je te dis comme t’a ordonné le Messager d’Allâh le jour d’Ouhoud : range ton sabre et ne nous cause pas la calamité de ta mort. Par Allah! S’il nous arrivait un malheur en ta personne, l’ordre de l’Islam ne sera jamais plus rétabli après toi ». Abou Bakr retourna alors et envoya l’armée.
Sa désignation au poste de calife (35 H. ; 55 ans):
Lorsque ‘Othman Ibn ‘Affan, que Allâh l’agrée, fut assassiné, Talha, Az-Zoubayr et la plupart des Emigrants (Al-Mouhajiroun) et des Partisans (Al-Ansar) se réunirent et vinrent auprès de ‘Ali lui prêter serment. Le premier à lui prêter serment fut Talha, puis Az-Zoubayr et le reste des gens, et il fit après le serment un discours pour les gens, les conseilla, puis rentra chez lui. Ceci eut lieu le jeudi, cinq jours avant la fin de Dhoul l-hijjah, la trente-cinquième année de l’Hégire.
Il racontera à des hommes venus le questionner sur ce qui s’était passé : « Des gens ont attaqué cet homme [‘Othman] et l’ont tué; j’étais à l’écart d’eux; puis ils m’ont nommé dirigeant; n’était la crainte pour [l’avenir de] l’Islam, je n’aurais pas accédé à leur demande ». (Fath Al-Bâri 13/72)
Le jugement des meurtriers de ‘Othman :
La discorde va naître de la divergence quant à l’attitude à adopter face aux meurtriers de ‘Othman. C’est un droit des parents de la victime que de réclamer aux autorités que les meurtriers de leur parent soient jugés et exécutés. Malheureusement Ali n’a pour le moment pas les moyens de juger les insurgés et de leur appliquer le talion. En effet, il sent bien qu’appliquer le talion en pareilles circonstances risque de provoquer un embrasement généralisé; il pense donc laisser les choses se calmer et juger plus tard les meurtriers (Fath Al-Bâri 13/107)
Quelques mois passent ainsi. C’est cette absence d’application du talion qui va être mal interprétée par d’illustres personnages : Aïcha, Talha, Az-Zoubayr, Muawiya, Amr Ibn al-As, lesquels vont d’autant plus se méprendre sur les intentions d’Ali du fait que les insurgés lui ont massivement fait allégeance, le soutiennent et évoluent dans son entourage.
La bataille du chameau (36 H.):
Dans la ville de La Mecque, où ils se sont rendus, Talha et Az-Zoubayr vont rencontrer Aïcha, qui y était allée pour le pèlerinage. Ils ne comprennent pas les intentions de Ali et – en toute bonne foi – croient que c’est parce que les insurgés le soutiennent qu’il refuse de leur appliquer le talion. A la tête de tout un groupe, ils partent donc de La Mecque pour l’Irak – pour la ville de Bassora précisément -, pensant y appeler les gens à soutenir leur demande de l’application du talion. (Fath Al-Bâri 12/354, 13/71).
Quand il apprend la nouvelle du départ de ces trois personnages pour l’Irak, ‘Ali craint que cela soit le point de départ d’une division de la communauté. (Fath Al-Bâri 13/72)
Ali décide alors, avec l’objectif de clarifier les choses, d’aller, à la tête lui aussi d’un groupe, trouver les trois compagnons partis pour Bassora. Son fils Al-Hassan l’implore de ne pas quitter Médine et d’attendre que les choses se calment d’elles-mêmes (Ibn al-Athir), mais Ali part quand même; Al-Hassan n’aura d’autre choix que celui de se joindre à son père à cœur défendant.
Si les deux groupes sont sortis avec des effectifs, nul n’a l’intention d’en découdre avec l’autre : Kulayb al-jarmî raconte que les gens de ‘Ali disaient : « Nous ne sommes pas sortis pour les combattre – car nous ne combattrons que si eux nous attaquent en premier – mais pour apaiser »; Ali lui-même lui a dit des propos allant dans le même sens. (Fath Al-Bâri 13/72)
Abou Mûssa al-Ach’arî – qui était gouverneur de la ville de Kufa avant l’accession de ‘Ali au poste de calife, et que ‘Ali a gardé à ce poste – pense pour sa part que la situation est délicate et, bien que ‘Ali lui demande de mobiliser des gens de Kufa pour venir grossir ses effectifs, il n’est pas décidé à le faire. ‘Ali respecte son choix et envoie alors à Kufa son fils al-Hassan ainsi que ‘Ammar Ibn Yassir pour mobiliser des gens. (Fath Al-Bâri 13/73).
Arrivés face à face, Ali parle en aparté avec Az-Zoubayr et lui demande : « N’avais-tu pas entendu le Prophète dire, alors que tu pliais ma main : « Tu le combattras alors qu’il sera dans son droit, puis il aura le dessus ? »
– « J’avais effectivement entendu cela ; je ne te combattrai donc pas » répond Az-Zoubayr. (Fath Al-Bâri 13/70)
Il qui quitte alors les lieux et prend le chemin de Médine (Fath Al-Bâri 6/276).
La situation est en bonne voie d’être résolue pacifiquement. Malheureusement, pendant la nuit, des insurgés parmi les fauteurs de trouble contre ‘Othman, présents dans le camp de ‘Ali, attaquent le camp de ‘Aïcha. (Fath Al-Bâri 13/72)
Pensant être attaqué par ‘Ali, le groupe de ‘Aïcha prend les armes pour se défendre. Voyant le groupe de Aïcha l’attaquer sans raison apparente, ‘Alî appelle son groupe à prendre à son tour les armes pour se défendre. Et c’est le début de la bataille dite du Chameau (parce que Aïcha sera, au cours du combat, dans un palanquin sur un chameau). La bataille ne dure qu’une journée et se termine en faveur du groupe d’Alî. Alî proclame : « N’achevez aucun blessé, ne tuez aucun fuyard et n’entrez dans aucune demeure ». (Fath Al-Bâri 13/72).
Az-Zoubayr, dont nous avons vu qu’il avait pris le chemin de Médine avant que les combats débutent, a été tué pendant son sommeil par Amr Ibn Jurmûz, un homme qui était dans le groupe de ‘Alî, qui avait retrouvé Az-Zoubayr et qui croyait bien faire en l’assassinant; quand Amr Ibn Jurmûz apporte la nouvelle à Alî, celui-ci lui annonce que le Prophète (sur lui la paix) lui avait dit un jour : « Celui qui tuera le fils de Safiyya (Az-Zoubayr), fais-lui l’annonce de la géhenne ». (Fath Al-Bâri 6/276, 7/104).
Aïcha est traitée par ‘Alî avec tous les égards qui lui sont dus; il demande à Muhammad Ibn Abî Bakr, frère de Aïcha, de la conduire à Médine. Le Prophète lui avait dit un jour : « Quelque chose surviendra entre toi et Aïcha.
– Je serai alors le plus malchanceux des humains ! S’était exclamé Alî.
– Non, mais quand cela arrivera, fais-la retourner à son lieu de sécurité » (Fath Al-Bâri 13/70).
La bataille de Siffin (36 H.):
‘Ali exige la reconnaissance immédiate de son autorité califale. Il pense que le calife a le droit de combattre ceux qui, sous forme de groupe constitué, ne reconnaissent pas son autorité, même s’ils ne le combattent pas.
Al-Hassan, fils de Alî, implore de nouveau son père : « Ne marche pas contre Muawiya ». (Al-Bidâya Wan-nihâya cité dans WK p. 50).
Mais Alî décide de le faire pour établir l’autorité califale sur l’ensemble des terres musulmanes. (Fath Al-Bâri 6/753)
Questionné au sujet de la marche qu’il a ainsi entreprise, avait-elle comme source un dire du Prophète ou un avis personnel, Alî répondra : « Le Prophète ne m’a rien recommandé à ce sujet, ce n’est qu’un avis personnel ». (Abou Dâoûd 4666).
Les deux groupes se font face à Siffîn en dhul-hijja 36. Ils parlementent, essaient de trouver une issue pacifique à la crise. Ils n’y parviennent cependant pas, et en Safar 37, c’est le début des combats.
La bataille tourne à la faveur d’Alî. Amr Ibn al-As recommandé alors à Muawiya d’appeler à un arbitrage sur la base du Coran pour mettre fin au différend qui existe entre eux. Alî, confiant dans le fait qu’il est dans son droit, accepte en disant : « J’ai priorité pour cela ; que le livre d’Allâh soit donc entre nous ! ». (Fath Al-Bâri 8/748)
Il est prévu que, dans le but de cesser de faire couler le sang, deux hommes soient désignés comme arbitres, l’un du groupe de Alî et l’autre de celui de Mu’âwiya, et que leur décision fasse autorité. Muâwiya présente Amr Ibn al-As, tandis que Alî est représenté par Abou Mûssa al-Ash’arî (il avait proposé un autre personnage mais il a dû céder devant l’avis de son groupe). L’arbitrage doit se dérouler en ramadan 37 à Dûmat al-jundul, à Adhruh.
Ceux qui – dans le groupe de Alî – refusent l’arrêt des combats et cet arbitrage quittent, mécontents, ses rangs ; cela leur vaudra le nom de « kharidjites », « les sortants ». Ils étaient déjà opposés à Mu’âwiya et à Amr Ibn al-As; ils sont maintenant opposés à Alî aussi.
En ramadan 37, les deux arbitres, Abou Mûssa al-Ash’arî et Amr Ibn al-As, se rencontrent à l’endroit prévu. Al-Mughîra Ibn Shu’ba s’y rend lui aussi. Les deux arbitres envoient appeler Abdullah Ibn Omar et Abdullah Ibn az-Zubayr. D’autres personnalités de Qurayshite s’y rendent elles aussi. (Abdour-Razzâq)
L’arbitrage ne donne pas de résultats concrets. (Fath Al-Bâri 12/356)
Retourné à Kufa, il doit faire face à l’insurrection des kharidjites
Ibn Hajar relate comment Alî fait tous les efforts possibles pour montrer aux kharijites qu’ils se trompent, qu’ils reprennent une parole de vérité (« Allâh seul est l’Arbitre ») mais la comprennent et l’appliquent de façon entièrement erronée.
Alî dépêche auprès d’eux Ibn ‘Abbâs ; celui-ci leur parle et 20.000 d’entre eux reviennent, pendant que 4.000 persistent dans leur déviance. Alî leur dit alors : « Nous vous garantissons malgré tout trois droits : nous ne vous empêcherons pas de venir dans les mosquées, nous ne vous priverons pas de votre part dans la redistribution fiscale (fay’), et nous ne vous combattrons pas tant que vous-mêmes ne créerez pas l’oppression ».
Les kharijites se réunissent ensuite à Ctésiphon. Alî ne cesse de correspondre avec eux pour leur demander de revenir. Ils refusent et lui demandent de reconnaître d’abord qu’il a, lui, apostasié, et donc de se repentir. Alî continue sa correspondance, mais cette fois ils sont à deux doigts d’assassiner son émissaire. Puis ils prennent comme résolution que tout musulman n’appartenant pas à leur groupe pourra être tué et volé. Et ils se mettent effectivement à tuer ceux qui passent près du lieu où ils se sont établis. C’est seulement alors qu’Alî part les combattre. Il les écrase à Nehrawân, en l’an 38 (Fath Al-Bâri 12/355-356, 12/369-372)
Sa mort (40 H. ; 60 ans):
Il est mort le 21 Ramadhan de l’an 40H, à 60 ans. Il fut tué par la main d’un kharijite (parmi le peu qu’il en restait) dont le nom était ‘Abdou r-Rahman Ibn Mouljam Al-Mouradiyy. Son califat dura quatre ans et neuf mois.
Al-Haçan, Al-Houçayn, et Abdoullah Ibn Ja’far s’occupèrent de son lavage. Al-Haçan dirigea la prière funéraire qu’ils firent pour lui et il fut enterré peu avant l’aube. Certains disent en face de la Qibla de la mosquée de Koufa. Certains disent devant le palais des gouverneurs et d’autres ont dit au Najaf. Mais la vérité est qu’ils ont dissimulé sa tombe honorée par crainte des nuisances de la part des kharijites.
Sa description physique:
Il était, qu’Allâh l’agrée, mat de peau, ses yeux étaient grands et noirs, avec un beau visage, de taille moyenne, avec un peu de ventre, poilu, la barbe large.
Ses mérites:
Le Messager d’Allâh disait à ‘Ali : « Ta position envers moi est comme celle de Aron à Moise, mais il n’y aura aucun Prophète après moi« . (Al-Boukhâri, Mouslim, Ibn Mâja, Ahmad, An-Nasâi, At-Tahawi)
Le Messager d’Allâh a dit : « Certainement Allâh ma commandé d’aimer quatre personnes et m’a informé qu’Il les aime ».
Les compagnons ont demandé : « Ô Messager d’Allâh qui sont ces quatre personnes ».
Le Prophète a dit : « ‘Ali en fait partie le Prophète le répéta trois fois-, Abou Dhar, Salman al-Farsi, et Miqdad « . (Ibn Mâja n°149, Al-Hakim, Ahmad)
Il a aussi été rapporté que le Messager d’Allâh a dit : « Le Paradis désire ardemment trois hommes : ‘Ali, ‘Ammar et Salmân ». (at-tirmidhi n°3884)
Le Calife ‘Omar, répétait souvent : « Que je ne sois jamais confronté à un problème complexe sans trouver Abou l-Hassan pour le résoudre« . (Tabaqât Ibn Sa’di, 2/339)
Othman Ibn Affan
Son nom et sa généalogie:
Il se nomme Abou ‘Amr ‘Othman Ibn ‘Affan Ibn Abi l’As. Sa mère est ‘Arwa Bintou Kariz et son arbre généalogique rejoint celui du Prophète à ‘Abdou Manaf.
Sa naissance:
Il est né à At-Taif, six ans après l’année de l’éléphant.
Sa conversion (-13 H. ; 39 ans):
Il fut parmi les premiers convertis à l’Islam, par Abou Bakr, que Allâh les agréé tous deux. Il avait à ce moment-là trente-neuf ans.
Ses combats dans la voie d’Allâh :
Il assista à tous les grands évènements avec le Messager d’Allâh sauf la bataille de Badr car sa femme Rouqayya était malade. Ainsi le Prophète lui ordonna de rester à son chevet à Médine ; il le compta cependant parmi les participants à la bataille de Badr et lui donna sa part du butin.
Son élection en tant que calife (23 H.):
Il lui fut prêté serment comme successeur à la tête des musulmans trois nuits après l’enterrement de ‘Omar Ibn l-Khattab, que Allâh l’agrée.
Arrive l’heure de la prière de l’aube. Après l’avoir accomplie, Ibn Awf envoie quérir tous les Emigrants et les Auxiliaires présents à Médine, tous les chefs des armées – ils étaient venus accomplir le pèlerinage à la Mecque avec le défunt calife Omar – et tout ce monde se réunit dans la mosquée du Prophète. Ibn Awf déclare alors qu’après avoir consulté les gens, il a constaté « qu’ils ne considèrent personne comme étant du même niveau que ‘Othman ».
Il fait alors allégeance à ce dernier, et les responsables présents la lui font eux aussi (Al-Boukhâri 7207). Alî aussi lui fait allégeance (Al-Boukhâri n°3700).
Les expéditions qu’il envoi:
Beaucoup de pays furent conquis à son époque, comme l’Arménie et la Tripoli occidentale.
‘Othman prépara une armée pour la conquête de l’Ifriqiya – l’actuelle Tunisie -. Le roi de cette région était Jarjir, un représentant d’Héraclius à qui il envoyait chaque année un tribut. Lorsque ce roi apprit la nouvelle, il réunit une armée de cent vingt mille hommes et vint à la rencontre des musulmans à Soubaytoulah, la capitale de son royaume. Ils l’appelèrent à l’Islam ou à payer la jizyah mais il fit preuve d’orgueil.
Puis ‘Othman envoya ‘Abdoullah Ibn z-Zoubayr avec des soldats en renfort. Jarjir eut vent de l’arrivée des renforts et prit peur. Les affrontements commencèrent, la bataille fit rage. Ils prirent d’assaut les campements romains et les mirent en déroute, beaucoup d’entre eux furent tués. ‘Abdoullah Ibn z-Zoubayr tua Jarjir, conquit Soubaytoulah, puis les habitants de l’Ifriqiyah demandèrent la paix moyennant deux millions cinq cent mille dinars.
Les problèmes qu’Il dû affronter en tant que calife:
C’est durant le califat de notre maître ‘Othman, que Allâh l’agrée, que commencèrent les critiques vis-à-vis des gouverneurs qu’il avait nommés dans différentes contrées. Les gens reprochaient des erreurs de la part des gouverneurs et les amplifiaient; ces propos se propagèrent entre certains résidents de ces contrées qui commencèrent à parler à haute voix d’oppression et d’injustice de la part des gouverneurs mis en place par ‘Othman dans les différentes contrées et régions. Ces paroles finirent par parvenir aux plus grands compagnons à Médine. Ils parlèrent à ‘Othman en lui demandant de révoquer certains gouverneurs afin de faire cesser cette dissension. Alors ‘Othman envoya des observateurs dans les différentes contrées qui lui rapporteraient les informations réelles. Entre autres, il envoya Mouhammad Ibn Maslamah à Koufa, Oussama Ibn Zayd à Bassora, ‘Abdoullah Ibn ‘Omar au Cham et ‘Ammar Ibn Yassir en Egypte. Ils partirent et revinrent en disant : » Nous n’avons rien vu de blâmable ».
Les instigateurs pervers de la dissension cachaient intérieurement ce qu’ils recélaient de fourberies dans le cœur, ils faisaient croire aux gens qu’ils voulaient faire apparaître la vérité et la justice. Leur leader dans cette affaire était ‘Abdoullah Ibn Saba connu sous le nom de » Ibn as-Sawda ». C’était un juif d’Irak, montrant hypocritement l’apparence de l’Islam dans le but de semer la dissension et la division dans la communauté musulmane. Lorsque les gens de Bassora le démasquèrent, ils l’expulsèrent de cette ville, il se rendit alors à Koufa puis au Cham, d’où il fut de nouveau expulsé. Ibn Sawda se dirigea vers l’Egypte et s’y implanta. C’est là-bas que le nombre de ses adeptes augmenta. Sa nuisance envers ‘Othman redoubla car son but était de faire diverger la parole des musulmans.
Les cerveaux de l’intrigue n’ont aucun scrupule pour parvenir à leurs objectifs : ils n’hésitent pas à écrire des faux qu’ils signent du nom d’illustres compagnons et qu’ils envoient à des gens pour les soulever. Ils prétendront ainsi qu’Alî leur a écrit une lettre critiquant ‘Othman.
Alî s’exclamera : « Par Allâh je ne vous ai jamais envoyé de lettre ».
Pareillement, alors que Masrûq reproche à Aïcha d’avoir écrit aux gens pour les soulever contre ‘Othman, elle proteste et dit : « Par Celui en qui les croyants ont foi et que les incroyants renient, je ne leur ai pas écrit une seule lettre ! ».
Il met en place dans chaque grande ville un registre public destiné à recevoir les doléances des administrés, il invite ceux qui ont des plaintes à venir les faire entendre lors du pèlerinage; mais il refuse que pour le défendre on entreprenne quelque chose susceptible de faire couler le sang.
Mu’âwiya lui proposera d’envoyer une petite armée assurer l’ordre à Médine car celle-ci pourrait être la proie de ceux dont on sent bien qu’ils sont en train de faire naître une lame de fond. ‘Othman refuse. Plus tard d’autres compagnons lui proposeront de le défendre contre les insurgés. ‘Othman refusera encore de faire le premier des pas qui feront couler le sang.
Sa maison prise en siège pendant 40 jours :
Les critiques se multiplièrent ainsi que les on-dit à Médine. Les chefs meneurs de la dissension contactèrent leurs adeptes dans les différentes villes, leur disant de se présenter à Médine. Ces derniers entrèrent à Médine sous le prétexte du pèlerinage, en cachant leur complot visant à porter atteinte à ‘Othman, que Allâh l’agrée.
‘Othmân leur demande : « Que voulez-vous ? »
Ils font part de leurs exigences, et ‘Othman finit par s’engager à les respecter : il y a notamment le fait de ne plus nommer que les gens que ces insurgés estiment dignes des postes administratifs; il y a aussi le fait de répartir les recettes fiscales de façon égale. Pour leur part les insurgés prennent l’engagement de reconnaître son autorité en tant que calife.
Ils repartent alors de Médine satisfaits, mais bientôt ils interceptent un cavalier porteur d’une lettre signée de ‘Othmân qui demande au gouverneur d’Egypte de mettre à mort les insurgés. Ils reviennent alors à Médine. Des insurgés viennent rencontrer Alî et lui disent qu’ils vont se soulever contre ‘Othmân et qu’il doit les aider dans cette entreprise. Devant son refus, ils lui disent : « Eh bien pourquoi nous as-tu donc envoyé la lettre ?
– Par Allâh je ne vous ai jamais envoyé de lettre ! » proteste Alî.
Les insurgés vont demander des explications au calife ‘Othmân. Celui-ci jure ne pas être à l’origine de la missive qu’ils ont interceptée. Ils lui demandent alors de leur remettre Marwân Ibn al-Hakam, son secrétaire. ‘Othmân refuse. Les insurgés assiègent ‘Othmân dans sa maison.
Ils l’assiégèrent durant quarante jours, allant jusqu’à l’empêcher de se procurer de l’eau. ‘Ali se mit en colère et fit apporter de l’eau, puis envoya Al-Haçan, Al-Housayn et un groupe de fils des compagnons monter la garde devant la maison de ‘Othman, craignant qu’on la prenne d’assaut. Les rebelles attaquèrent en se ruant sur la porte de ‘Othman, mais ils en furent empêchés par Al-Hasan, Al-Housayn, Az-Zoubayr, Talha et d’autres, puis ils escaladèrent les murs et prirent d’assaut la maison en passant par la maison de ‘Amr Ibn Hazim et ceux qui gardaient la porte ne s’en aperçurent pas.
Mouhammad Ibn Abi Bakr entra et parla avec ‘Othman, alors ‘Othman lui dit : « Si ton père Abou Bakr te voyait il n’accepterait pas cela », alors il eut honte et sortit en regrettant.
Il a refusé les trois propositions de Al-Mughîra Ibn Shu’ba dont l’une est d’employer la force pour combattre les insurgés présents à Médine (Ahmad n°451).
Quant à ces insurgés, ‘Othmân leur dit : « Si vous me tuez, alors vous ne pourrez plus vous aimer les uns les autres, vous ne prierez plus sous la direction des uns et des autres et vous ne serez plus unis face à vos ennemis ». (At-Tabari)
‘Othmân rappelle aux insurgés que le Prophète a interdit de verser le sang de l’homme, sacré par nature, sauf dans des cas précis; or aucun de ces motifs n’est présent en lui; « Pour quelle raison allez-vous donc me tuer ? » questionne-t-il (At-Tirmidhi n°2158, Abou Dâoûd n°4502, An-Nasâi n°4019, Ibn Mâja n°2533).
‘Othmân leur rappelle aussi que, du temps du Prophète, alors que les musulmans devaient auparavant acheter leur eau, il a, sur la demande du Prophète, acheté et offert aux musulmans le puits de Ruma à Médine et qu’aujourd’hui les insurgés lui interdisent de bénéficier de l’eau de la ville ; qu’il a acheté une parcelle de terrain pour la joindre à celle de la mosquée du Prophète et qu’aujourd’hui ils lui interdisent d’accomplir ne serait-ce qu’une prière dans cette même mosquée ; qu’un jour, alors que le Prophète, Abou Bakr, Omar et lui-même se trouvaient sur une colline de la Mecque, que celle-ci avait eu une secousse et que le Prophète avait alors dit à la colline de se tenir tranquille car elle portait un Prophète, un juste et deux martyrs. Ses ennemis ayant reconnu tout ce qu’il leur dit, ‘Othmân s’exclame : « Allâhu Akbar ! Ils sont témoins, en ma faveur, par le Seigneur de la Kaaba, que je suis martyr ! ». (At-Tirmidhi n°3703, An-Nasâi 3608)
Sa mort (35 H. ; 81 ans):
Puis, les effrontés semeurs de discorde entrèrent chez lui et l’un d’entre-deux le frappa de son sabre, sa femme Na’ilah se précipita sur lui et eut les doigts de la main sectionnés, puis ils le tuèrent, l’insurrection fit rage et la maison fut pillée. Il est mort le vendredi 18 de Dhoul l-Hijja en l’an 35 H, à 81 ans. Son califat dura douze ans moins un jour.
‘Othman, que Allâh l’agrée, avait dit avant son assassinat : « Hier, j’ai vu le Messager d’Allâh en rêve ainsi que Abou Bakr et ‘Omar qui m’ont dit : Patiente, car tu déjeuneras auprès de nous la nuit prochaine ».
Son enterrement:
Il resta dans sa maison trois jours puis Hakim Ibn Khouzam et Jabir Ibn Mout ‘Am vinrent auprès de ‘Ali qui les autorisa à préparer ses funérailles et à l’enterrer, il fut enterré entre al-Maghreb et al’ icha dans un jardin que ‘Othman, que Allâh l’agrée, avait acheté et qu’il intégra au cimetière de Baqi’ou l-Gharqad.
Sa description physique:
Il était de taille moyenne, avait un beau visage, blanc avec une rougeur, sur lequel apparaissaient des cicatrices suite à la variole. Il avait la barbe épaisse, les épaules larges, les bras longs et recouverts de poils.
Ses mérites:
On rapporte au sujet de Abou Musa Al Ash’ari qu’il dit : « Si Allâh veut du bien à mon frère. Il le fera venir à cette heure ».
Juste à ce moment quelqu’un fit bouger la porte. Je dis : « Qui va là? »
Il dit : « ‘Othmân Ibn ‘Affàn ».
Je dis : « Attends un peu! » Je partis l’annoncer au Prophète qui dit : « Laisse-le entrer et annonce-lui le Paradis ainsi qu’une épreuve qui le touchera ».
Je revins et dis : « Entre! Le Messager d’Allâh t’annonce le Paradis ainsi qu’une épreuve qui te touchera ».
Il entra et, ayant trouvé ce côté de la margelle déjà occupé, s’assit sur le côté d’en face ». (Al-Boukhâri, Mouslim)
Selon ‘Aïcha : « Le Prophète était assis avec une cuisse découverte, Abou Bakr lui demanda permission d’entrer et il lui accorda sans changer de position, ensuite lui demanda ‘Omar et il lui accorda sans changer de position, ensuite lui demanda ‘Othmân et il recouvrit sa cuisse. Quand ils sont sortis je lui ai demandé : « Ô Messager d’Allâh, Abou Bakr et ‘Omar t’ont demandé la permission d’entrer et tu leur a accordé sans changé ta posture; mais quand te l’a demandé ‘Othmân tu t’es recouvert » ?
Il dit : « Ô ‘Aïcha, ne devrais-je pas avoir honte d’un homme duquel, par Allâh, les anges ont hontes de lui » ». (Ahmad, Al-Boukhâri en a également parlé)