Mawlânâ Cheikh Ahmad Ibn Mohammad Ibn Moukhtâr at.-Tidjâni est né à Aynou-Mâdhi (Algérie), dans la nuit du 18 safar, en l’an 1150 (lundi 17 juin1737).
Son père s’appelait Mohammad Moukhtâr et sa mère Ayshâ Bint Mohammad Sanoussi at.-Tidjâni. Sa famille paternelle appartenait à la branche des Maddawayi.
A sept ans, le jeune Ahmad aura mémorisé les 114 sourates du saint Coran sous la conduite de Mohammad Ibn Hammou at.-Tidjâni, un maître de renom.
Il apprit le droit musulman à l’école mâlikite et étudia les différents traités de jurisprudence auprès du connaissant d’Allah, le savant Mabrouk Ibn Boû’afiya Madawi at.-Tidjâni. Ahmad at.-Tidjâni était intelligent, pieux, modeste, assidu dans ses études et plein de volonté ; « tout ce qu’il entamait, il le terminait », soutenait son entourage.
Un jour, en sortant de ses cours, devant lui, il vit une lumière qui montait jusqu’au ciel, puis le Prophète (sas.) apparut et lui dit : « Continue car tu es dans la vérité ! »
A maintes reprises, le Prophète (s a s) lui apparut tant à l’état de veille qu’en rêve. Mieux, la plupart du temps, Cheikh at.-Tidjâni se voyait sur un trône commandant des milliers de créatures. A 15 ans, il était mufti ou docteur de la loi.
Sur une forte recommandation de ses parents, il contracta son premier mariage aux alentours de ses 16 ans ; mais cette union n’a pas fait long feu.
C’est également à l’âge de 16 ans que, suite à une épidémie de peste, il perdit ses parents, le même jour. Les défunts furent inhumés dans une tombe commune.
A 21 ans, il avait déjà fait le tour des savoirs livresques et tous les savants lui reconnaissaient déjà le titre très enviable d’«Océan du savoir. »
C’est à l’état de veille que le Prophète Mohammad (sas.) lui confirma qu’il était son petit-fils en lui assurant : « Réellement tu es mon fils … Ton ascendance par Hassan ibn Ali est authentique. » Sa chaîne généalogique est la suivante :
1. Fils de Mohammad
2. Fils de Moukhtâr
3. Fils d’Ahmad
4. Fils de Mohammad
5. Fils de Salim
6. Fils d’Abi-l’Ayid
7. Fils de Salim
8. Fils d’Ahmad Alwani
9. Fils d’Ahmad
10. Fils d’Ali
11. Fils d’Abd Allah
12. Fils d’Abbâs
13. Fils d’Abd-el-Jabbâr
14. Fils d’Idriss II
15. Fils d’Kabîr
16. Fils d’Ishâq
17. Fils d’Ali Zeyn el Abidîn
18. Fils d’Ahmad
19. Fils de Mohammad Nafs Zakkiya
20. Fils d’Abd Allah Kâmil
21. Fils de Hasan Mouççanna
22. Fils de Hasan Moujtabâ
23. Fils d’Ali et de Sayda Fatoumata Bint Rasouloulâh (s a s)
C’est également à l’âge de 21 ans, qu’il quitta Aynou-Mâdhi pour Fès (Maroc), siège de la grande Université-Mosquée Qarawiyyin. En un temps record, il acquit tous les titres académiques auxquels il aspirait.
Malgré tout, cela ne le grisa nullement parce qu’il tenait à aller encore plus loin pour étancher sa soif de savoir. Il retourna à Aynou-Mâdhi, puis se rendit à Abid-Sîdi-Cheikh auprès de Sîdi Cheikh Ben ed-dîn, ensuite il séjourna à Tlemcen en 1768. Il avait alors 31 ans. Il y enseigna plusieurs années durant.
Tout au long de son cursus initiatique, Cheikh Ahmad at.-Tidjâni aura embrassé six voies et rencontré d’éminents savants tels Mawlânâ Tayb Ibn Mohammad. Il a été Qâdr à Fès, nasri auprès du wali Sîdi Mohammad Ibn Abdallâh Tazani…Il a côtoyé le Pôle Sîdi Ahmad el-Habib Ibn Mohammad connu sous le nom de Ghamary Sejelmasi. Il fréquenta d’autres saints comme Sîdi Mohammed Ibn el-Hasan el-Wanjali, Sîdi Abou el-Hasan Chadili, Sîdi Abdallâh Ibn Sîdi Ibn Arbi ibn Ahmad du Waled Ma’am el-Andaloussi. A juste raison, il affirmait qu’il n’avait pas reçu son savoir que d’une seule personne, mais de tous ceux qu’il a rencontrés.
En 1773, Cheikh Ahmad at.-Tidjâni sentit le besoin d’accomplir le pèlerinage à La Mecque, cinquième pilier du culte islamique. C’est au cours de ce long périple que, dans les environs d’Alger, il s’initia à la voie Khalwatiya, auprès de Sîdi Mohammad Ibn Abd er-Rahman el-Azhari. Il séjourna une année en Tunisie où il enseigna les Hikam d’Ibn Ata Allâh.
Sur son chemin, il s’arrêta au Caire et y rencontra le wâli, Sîdi Mahmoud al-Kourdiy, originaire d’Irak. Les deux saints eurent une discussion mystique au terme de laquelle Al-Kurdiy révéla à Cheikh at-Tidjâni que Dieu lui réservait une carrière exceptionnelle et qu’il serait même plus grand qu’al-Qoutbaniyal-ouzma.
Cheikh at-Tidjâni poursuivit son voyage et arriva à La Mecque où il entra en contact avec Cheikh Sîdi Ahmad Ibn Abd Allâh el-Hindy. Ce dernier lui fit entendre ceci : « Tu es l’héritier de ma science, de mes secrets, de mes dons et de mes lumières. » A cette occasion, El-Hindy transmit à Cheikh at-Tidjâni tout ce dont il disposait et rendit l’âme peu après.Par la suite, Cheikh Ahmad at-Tidjâni joignit Madîna où il rencontra Sîdi Mouhammad Ibn Abd el-Karîm Sâman.
Après une retraite spirituelle (khalwa) de trois jours, Cheikh Sâman lui donna d’autres merveilles dont Hizboul Bahri, Moussaba’ atoul ashri, Dawroul a’lâ etc…Cheikh at-Tidjâni y visita la tombe du Prophète Mouhammad (s a s) et retourna au Caire où Sîdi Mahmoûd al-Kourdiy lui transmit la voie Khalwatiya (basée en partie sur la Salâtoul Fâtihî dont la composition a été attribuée à Mouhammad el-Bakri), en lui délivrant le diplôme d’autorisation afin qu’il initiât et formât ses disciples à cette voie ; c’est ce wird que le Cheikh transmit en premier lieu à Mouhammad al-Mishriy qu’il rencontra vers 1768 et à El-Hâdj Aliy Harâzîm dont il fit la connaissance, en route de Fès, à Wadjda vers 1778.
D‘ailleurs, à propos de l’origine de la Salâtoul Fâtihî, le Prophète (s a s) a révélé au Cheikh ceci : « Salâtoul Fâtihî n’a pas été composée par El-Bakri, mais ce dernier s’est orienté vers Allâh pendant une longue durée (60 ans ?) afin que lui soit révélée la prière (sur le Prophète) qui contient plus de mérite que l’ensemble des autres prières et qui contient le secret de l’ensemble des autres prières. Sa demande fut longue mais exaucée. Un ange est alors venu à lui avec cette prière écrite sur un écriteau de lumière. »
Cheikh at-Tidjâni lui-même a dit : « Parmi les supplications, il en est une qui équivaut à la récompense de la nuit du Destin telle que Sayfiyou, or le Nom suprême équivaut à 36 millions de nuits du Destin ; une seule fois le Nom Suprême équivaut à 6000 Salâtoul Fâtihî et une Salâtoul Fâtihî équivaut à 6000 supplications telle que Sayfiyou ; donc si tu multiplies 6000 par 6000, tu trouves 36 millions et cela concerne une seule récitation de Salâtoul Fâtihî. »
Cheikh at-Tidjâni a ajouté : « Si les habitants des sept cieux et tous ceux qu’ils contiennent et les habitants des sept terres et tous ceux qu’elles contiennent se rassemblent pour décrire la valeur de Salâtoul Fâtihî, ils n’en seraient pas capables… Car elle provient de l’invisible sous cette forme et tout ce qui provient de l’invisible, sa perfection est confirmée ; elle ne provient pas d’une composition écrite. »
Mawlânâ Cheikh a aussi déclaré : « Salâtoul Fâtihî est une grâce divine qui ne laisse pas de place à la raison humaine. S’il y’avait 100 000 communautés et que chacune soit composée de 100 000 tribus et que chaque tribu soit composée de 100 000 hommes et que chacun de ces hommes vive 100 000 ans en récitant chaque jour 100 000 prières sur le Prophète (sas) autre que la Salâtoul-Fâtihî, et qu’on rassemble toute la récompense de ces communautés durant toute cette période, on n’arriverait pas à la récompense de l’évocation d’une seule Salâtoul Fâtihî. »
A ce propos, Cheikh Ahmad at-Tidjâni a enfin dit : « …Une seule Salâtoul Fâtihi équivaut à toutes les évocations, toutes les formules de glorification, toutes les demandes de pardon, toutes les implorations accomplies dans l’univers, qu’elles soient petites ou grandes, le tout multiplié par 6000.»
Pour résumer, Cheikh Tidjâne soutient : «Tout ce que vous avez entendu sur les mérites de cette salât comparé à ce qui est resté caché est semblable à une goutte d’eau dans un océan… Le Prophète (sas) m’a dit : Personne n’a prié sur moi qu’avec la Salâtoul Fâtihi. »
Quant à la Perle de la perfection ou Jawharatoul-kamâl, elle a été révélée par le Prophète (s a s) à Seydî Mouhammad Ibn ‘Arabi at-Tâzi ad-Damrâwi, un disciple et compagnon du Cheikh Ahmad at-Tidjâni (décédé en 1789-1790 à 28 ans). Les deux hommes se sont connus à Tlemcen vers 1782. C’est à Ad-Damrâwi que le Prophète dicta cette prière afin qu’il la transmît directement au Cheikh Ahmad at-Tidjâni qui en était le principal destinataire. De Jawharatoul-kamâl, nous dirons ceci :
· Celui qui la récite sept fois et plus, alors l’esprit béni du Prophète et des quatre califes râshidun viennent en sa présence tant qu’il l’évoque.
· Celui qui la récite régulièrement plus de sept fois, alors le Prophète l’aimera d’un amour particulier et il mourra en étant un wâli.
· Celui qui la récite avant de dormir, dans une pureté totale, sur un lit ou une natte propre, verra le Prophète.
· L’évocation d’une seule Jawharatoul équivaut en récompense à trois fois la glorification du monde entier.
En 1782, à l’âge de 46 ans, entre Challala et Abi-Samghour, le Cheikh eut sa grande ouverture, fat’houl’akbar. Il retourna au Maghreb, plus précisément dans le désert algérien et y resta de 1784 à 1798.
Entre-temps, en 1786, il reçut du Prophète 100 lâ illaha illa lâh, ce qui compléta le wird qui devint alors le triptyque Takhalli, Tahalli, Tadjalli, substances s’appuyant sur le Coran :
· Takhalli
· Tahalli
· Tadjalli
A l’état de veille, le Prophète (sas.) lui annonça : « Je suis désormais ton Initiateur, ton maître, aucun être humain ne prétendra être ton initiateur, il te faut par conséquent abandonner toutes les voies auxquelles tu étais affilié précédemment ; personne n’aura de reproche à te faire car c’est moi qui serai ton intermédiaire auprès d’Allâh et aussi ton auxiliaire. »
Le Prophète lui recommanda la récitation de 100 Astagh firoulâh et 100 Salâtoul fâtihî limâ ouqliqa tout en lui disant : « Prends cela et fais-en ta Voie. Quiconque la prend de toi entre au Paradis avec ses deux parents, ses enfants, ses épouses et ses gendres, sans être jugés ni châtiés. Et, ils habiteront avec moi au Paradis le plus élevé.
Tu es celui qui intercède pour tout pécheur qui dépend de toi. Maintiens cette voie sans te retirer du monde, ni rompre avec le commerce des hommes jusqu’à ce que tu atteignes la station spirituelle qui t’est promise, tout en gardant ton état, sans grande gêne, ni effort cultuel excessif. Passe-toi de tous les saints !»
Cheikh at-Tidjâni devint ainsi le dépositaire de la voie spirituelle du Prophète lui-même, voie renfermant toutes les autres voies. C’est la tarîqa Ahmadiyya-Mouhammadiyya-Ibrâhîmiyya-Hanifiyya pleine de grâces jusque-là jamais atteintes. Il obtint alors l’ordre de propager cette voie et d’initier tout musulman qui se présenterait à lui. L’évidence coranique est la suivante : « Ô vous qui croyez, craignez Dieu et trouvez le moyen (wassila) de vous rapprocher de Lui et luttez pour Sa cause, peut-être serez-vous de ceux qui réussissent » 5, V.35.
Cette ascension attira l’aversion de l’establishment turc et la jalousie de certains de ses compatriotes tant et si bien que le Cheikh dut partir du village d’Abi-Samghour, en Algérie, le 17 rabi’ awwal 1213 (mercredi, 29 août1798) pour Fez où il arriva dix-neuf jours après, c’est-à-dire, le 6 rabi çânî (lundi17septembre1798). Son émigration au Maroc était définitive.
Sîdi Aliy Harâzîm entama la rédaction de Djawahiroul Mâni en 1798-1799.
Conscient de la conformité de sa voie avec la loi islamique, Mawlânâ Cheikh Ahmad at-Tidjâni a tenu à dire: « Si vous écoutez de ma part quelque chose, pesez-le avec la balance de la chari’â (loi) ; si cela concorde, oeuvrez ! Si cela est en contradiction, délaissez-le ! » Le jour-même où il est arrivé à Fès, le Cheikh obtint sa grande station, celle du Khatmoul-wilâyati.
En 1799, à Arafat, il reçut le grade de Qoutbaniya al-ouzma ou Sceau de la sainteté.
La même année, plus précisément, le 18 mouharram (dimanche 23 juin 1214) à 0 h 30mn, Dieu fit du Cheikh Son représentant sur terre et le vicaire du Prophète (s a s) dans la religion : c’est le grade de Qutb al-maktoum ; c’est-à-dire celui qui détient le décret de toute chose. Le verset 09 de la Sourate 42 nous y édifie : «…Quoi ! Prendront-ils patrons en dehors de Lui ? Mais Dieu, c’est Lui le patron (walîyou) et c’est lui qui donne la vie aux morts ; et c’est lui qui est capable de tout. »
Dans le même ordre d’idées, un hadith rapporté par Omar Ibn Ambassata affirme: « J’ai entendu le Prophète (sas) dire: « Je jure par la main droite du Miséricordieux, et toutes Ses deux mains sont droites, il y a des hommes qui ne sont ni prophètes, ni martyrs, cependant la lumière de leurs visages éblouira ceux qui les regarderont et c’est à peine si on les voyait à cause de (l’intensité) cette lumière.
Et les prophètes et les martyrs leur envient la magnificence de leur position et leur grande proximité de Dieu Glorieux et Exalté ». On lui demanda : O Prophète (sas) qui sont ces gens ? Il répondit : « C’est une communauté issue de plusieurs races, qui se réunit pour mentionner le Nom de Dieu et disant des paroles pures à l’odeur et au goût aussi agréables que la meilleure des dattes ».
La grande communauté de Mawlânâ Cheikh Ibrâhîm NIASS s’est toujours inscrite dans cette voie. Mieux, parallèlement au respect scrupuleux qu’elle voue à la chari’â, tel que Cheikh Bâye l’a recommandé à ses disciples dans une de ses lettres qu’il a rédigées en 1930, notre Jama’a a toujours fait du zikru lâh sa préoccupation première.
Grâce à Dieu, At-Tidjâni a atteint deux stations uniques dans la hiérarchie spirituelle des saints : celle de Khatmiya (Sceau des saints, clôturant pour toujours les degrés de sainteté) et celle de Katmiya (Pôle caché, station connue seulement d’Allâh et de son Prophète). C’était le 18 safar de l’an 1214 (lundi 22 juillet 1799). C’est à propos de cette station hors du commun que Mouniyyatoul Moûrîd du nom d’Ibn Bâba al-Alawi a écrit :
«Après un mois et des nuits, il s’éleva
A sa station noble et pure
Station dissimulée à l’ensemble des créatures.
Hormis la prophétie,
Rien n’est plus élevé que cette station. »
Mawlânâ Cheikh Ahmad at-Tidjâni surclasse tous les saints depuis Adam jusqu’à la fin des temps. Aussi a-t-il déclaré : « Le Maître de l’existence m’a informé de vive voix que je suis le Pôle caché, cela à l’état de veille et non en rêve…et que tout saint ne boit et n’est abreuvé que de notre océan depuis la création jusqu’au jour où on soufflera sur la trompe…L’essence du Prophète irrigue les essences des messagers et prophètes ; mon essence irrigue les pôles, les Connaissants d’Allâh et les wâlis depuis la préexistence et, ce, jusqu’à l’éternité. »
Cheikh Ahmad at-Tidjâni ne se vantait nullement pas, mais il se conformait à une injonction d’Allâh. « Et quant aux bienfaits de ton Seigneur, raconte-les !». (S. 93 ; V.11).
Mawlânâ Ahmad at-Tidjâni avait aussi avancé cette boutade : « Mes deux pieds que voici sont sur la nuque de chaque wâli ». On lui rétorqua que c’est ce que Sîdi Abd el-Qâdr Dieylani avait également déclaré à son époque. Cheikh Ahmad at-Tidjâni acquiesça en ajoutant : «…mais Sîdi Abd-el Qâdr ne parlait que des wâlis de son époque, quant à moi, je dis que mes deux pieds que voici n’ont jamais cessé d’être sur la nuque de tout wâli.)
Sîdi Mouhammad al-Ghâli, un de ses illustres disciples renforça : « C’est par son intermédiaire que tous les saints, sans en avoir conscience, reçoivent l’influx des Prophètes. »
Seulement, il convient de préciser que l’expression « Sceau de la sainteté » ne saurait signifier le dernier des saints, loin de là, mais le degré de parachèvement de la sainteté car après Cheikh Ahmad at-Tidjâni des saints sont nés et d’autres naîtront sûrement.
Avant de terminer ce chapitre, nous portons à l’attention de cet aréopage d’â’arifun billâh le fruit du rêve d’un grand soufi qui soutient : « La voix du Seigneur résonna dans mon cœur et fit trembler tout mon être. Dieu dit : « Lorsque j’ai fini de créer le monde, j’ai créé les hommes en prenant soin de les répartir en dix groupes.
Neuf d’entre eux se sont laissé fasciner par les plaisirs terrestres et inconsistants. Ils m’ont oublié et se mirent à courir après leur âme charnelle et concupiscente et leur « moi égoïste » pour satisfaire leurs moindres désirs. Alors j’ai créé l’Enfer. Ceux qui étaient restés avec moi se sont à leur tour divisés en dix groupes.
La crainte des feux de l’Enfer fit que neuf groupes parmi les dix m’ont oublié, s’adonnant aux actions pieuses et autres rituels religieux dans l’espoir de se mettre à l’abri de ce châtiment. Ainsi, ils s’éloignèrent de moi et se noyèrent dans la pratique formaliste de la religion.
C’est alors que j’ai créé le Paradis. Là encore ceux qui ne m’avaient pas quitté se sont divisés en dix groupes. Neuf d’entre eux choisirent le Paradis et m’ont oublié, bercés par l’espoir d’avoir la félicité éternelle.
De tous les hommes que j’avais créés, il ne restait qu’un petit groupe de fidèles ne voulant me quitter à aucun prix. Ceux là me cherchaient, me demandaient à chaque souffle. J’ai connu en eux les véritables amoureux de ma Cour». Plaise à Allah que nous soyons de ceux-là !
Décès à Badr de Sîdî Aliy Harâzîm Barâda en 1803 et de Sîdî Mouhammad I Mishriy en 1808.
Mawlânâ Cheikh Ahmad at-Tidjâni quitta ce bas-monde le jeudi 17 shawwal 1230 correspondant au 21 septembre 1815, après la prière de l’aube, à 78 ans ou 80 ans selon le calendrier lunaire. A ce moment-là, il comptait un nombre de disciples équivalent à celui des prophètes et des envoyés, soit 124 000. Mouhammad el Mançoûr el Mouhiedin Tidjâni le peint sous la forme suivante : « Les traits de son visage radieux, d’un blanc rosé, son allure princière, bien qu’il soit le plus humble, marquent en lui sa haute lignée.
Imitant le prophète Mouhammad (sas) dans tous les actes et conditions, sa barbe, filée de poils gris resplendissant, faisait jaillir de lui une lumière mystérieuse.
Riche par Dieu, ne demandant rien à personne, il fut honoré de grâce qui faisait qu’il ne comptait que sur Dieu. Il dévoila ce qui est permis et cacha ce qui pouvait perturber l’esprit.
Par Tâhâ, son maître et compagnon, tel le soleil et la lune, nul ne pourrait plus séparer ces deux Sceaux de la même famille pour l’amour qu’ils avaient pour Lui. »
Cheikh Ahmad at-Tidjâni a laissé deux héritiers: Mouhammad al-Kabîr (issu de son union avec Lalla Mabroûka) décédé en 1826 sans enfant et Mouhammad al-Habîb (issu de son ménage avec Lalla Barakatou) décédé en 1852). Cheikh at-Tidjâni confia ses deux fils à son disciple Aliy Tamasiniy dont il a fait la connaissance à Aynou- Mâdhi dès 1789. Ce dernier décéda en 1844.
Soit dit en passant, la photo qui orne la plupart de nos salons n’est pas celle du Cheikh, mais plutôt de son petit-fils, Sîdi Ammar Ibn Sîdi Mouhammad al-Habîb at-Tidjâni, qui, en 1871, épousa Aurélie Picard, née le 12 juin 1849 à Montigny-le-Roi et surnommée Lalla Yamîna.
Claude Picard, le père d’Aurélie, avait servi en Algérie comme gendarme. Sîdi Ammar aurait vécu de 1826 à 1896 et, compte tenu de son opposition à la colonisation, il fut assigné à résidence surveillée à Bordeaux par l’occupant français d’alors. Il assuma la réalité du califat de 1870 à 1896. Lui ont succédé :
· Sîdi Bachîr Tidjâni de 1896 à 1910
· Sîdi Allal Tidjâni de 1910 à 1919
· Sîdi Mouhammad el Kabîr Tidjâni de 1919 à 1931
· Sîdi Mahmoûd Tidjâni de 1931 à 1934
· Sîdi Tâyib Tidjâni de 1934 à 1973
· Sîdi Ali Tidjâni de 1973 à 1990
· Sîdi Abd el Jabbâr Tidjâni de 1990 à 2005
· Sîdi Hâjj Mouhammad Tidjâni de 2006 à 2010
· Sîdi Ali alias Bel Arbi Tidjâni depuis le 04 octobre 2010
C’est vers 1828 que, devant la tombe du Prophète Mouhammad (sas), Sîdi Mouhammad al-Ghâli rencontra Cheikh Omar al-Foûtiyou Tâl, futur auteur d’ar-Rimah ou le «livre des lances ». Lances acérées encerclant Djawahiroul Mâni qu’elles protègent des stratagèmes de Satan et de ses suppôts humains. Al-Ghâli conféra à El-Hâdj Omar le titre de calife de la Tidjâniyya en Afrique noire.
Toutefois, il convient de rappeler que Cheikh Omar a été initié à cette confrérie par Seydî Abdoul Karîm Ahmad DIALLO, lui-même disciple de Cheikh Mawlûd FÂL. L’évènement s’est produit dans les parages de Podor, entre 1815 et 1820, en tout cas avant que Cheikh Omar n’ait entrepris son célèbre pèlerinage à La Mecque et son très bénéfique séjour à Madînat-munawwara.
L’œuvre de Mawlânâ Cheikh Ahmad at-Tidjâni est immense. Elle s’inscrit harmonieusement dans un cadre plus large fondé sur les enseignements du Prophète Mouhammad (sas), lesquels enseignements sont issus de la religion pure (hanif) d’Abrâham.
Les conditions ou principes qui sous-tendent la Târîqâ Tidjâne sont, comme précisé plus haut, en parfaite adéquation avec la Sounnah ou tradition mouhammadienne.