Qui était AL-HALLAJ, L’homme des Mystères | Pourquoi disait-il : Je suis le Vrai, « Ana al haqq » , je suis Dieu

Qui était AL-HALLAJ, L’homme des Mystères

Qui était AL-HALLAJ, L’homme des Mystères | Pourquoi disait-il : Je suis le Vrai, « Ana al haqq » , je suis Dieu

Surnommé Al-Hallâj al-Asrar, L’homme des Mystères (ou des secrets)… Al-Hallâj est un mystique qui avait au point de départ de sa quête un intense désir de Dieu : « J’avais le cœur plein de désirs dispersés, et depuis que l’œil t’a vu, les voici rassemblés. » Dans sa théorie des origines, deux thèmes principaux ont joué un rôle dans la structure de la doctrine religieuse : la chute de Satan et l’ascension nocturne de Muhammad (saws) qu’il développera dans ses œuvres de Tawasin (864-846). Parmi ses grands développements : la science des cœurs et l’aspiration à l’union divine par l’amour ; la recherche de la synthèse et du fondement spirituel propre à toutes les religions ; et la question de l’expérience.

La Science des cœurs est posée par le texte du Coran qui en pose les bases, science approfondie par les soufis. C’est par son cœur que l’homme entre dans la contemplation du divin. L’homme a différentes enveloppes successives qu’il lui faut traverser et qui correspondent au degré de purification de l’âme. Pour Hallaj, trois phases dans la voie, ou l’ascension : phase de pénitence, ou ascèse des sens ; phase de purification massive (on se détache de son moi subjectif) ou s’instaure une réciprocité de l’amour et du désir entre Dieu et sa créature ; et enfin phase de l’ascèse de l’esprit qui débouche sur l’union avec le divin. Le soufi a alors conquis le droit de dire le « je » qui l’unit à la source même de la parole divine car il atteint alors le stade de l’union transformante avec Dieu.

Différents poèmes donnent à voir sa science des cœurs et la question d’ascèse vers l’union :
« Mon regard, avec l’œil de la science a dégagé le pur secret de la méditation » ;
« Une lueur a jailli, dans ma conscience » ;
« J’ai vu mon bien-aimé avec l’œil de mon cœur. Et je lui dis : Qui es-tu ?
Il me répond : Toi ! » ;
« Je suis devenu celui que j’aime et celui que j’aime est devenu moi » ;
« Je suis devenu toi tout comme tu es devenu moi » ;
« Tu m’as rapproché de toi et j’en suis venu à croire que tu es moi » ;
« Comment pourrais-je m’amuser et être insouciant si vraiment moi c’est Lui » ; « On dirait que l’interlocuteur, c’est moi-même m’adressant par mon essence à mon essence » Qasida VII

Hallâj emploie le mot amour, « mahabbah », pour désigner les rapports du Créateur et de sa créature. Pour lui, l’amour primordial est l’amour de l’essence divine pour elle-même, l’amour se consomme et s’assouvit, lors de la connaissance parfaite « ma`rifah ». Al-Hallâj distingue entre la foi et les rites : celui qui veut se consacrer à l’amour de Dieu, va développer au plus profond sa foi intérieure ; les rites et les dogmes seraient secondaires, la religiosité l’écarterait de l’essentiel.

Dans sa recherche, il ira à Qom, centre du shiisme imâmite duodécimain où il tentera de développer toute une réflexion sur la doctrine de l’Imamat et de l’absence. Hallaj se veut un lieu où doit se réaliser une synthèse, cherchant de façon intuitive une source d’universalité :
« Sache que judaïsme, christianisme et islam, comme les autres religions, ne sont que dénomination et appellation, le but recherché à travers elles jamais ne varie, ni ne change. »
« J’ai longuement réfléchi aux diverses religions en tâchant de les assimiler, puis je les ai ramenées à un seul Fondement ayant maintes ramifications. Ne demandez pas à l’homme de s’en tenir à un culte déterminé, car cela l’écarterait certainement du Fondement divin assuré. »

Enfin, la question de l’expérience est dans sa doctrine aussi importante. Al-Hallâj, le mystique qui s’est plongé dans la méditation de Dieu, se trouve conduit non seulement à un « ittisâl » (contact entre l’âme de l’homme et Dieu), mais à un véritable hulûl (inhabitation), l’Esprit de Dieu habitant sans confusion de nature, l’âme purifiée du mystique.

« L’aimé à l’amant qui le chérissait s’est uni, tendrement tous deux se sont souri. Leurs formes se sont étreintes d’un seul élan, et ils ont succombé dans le monde évanescent. »
« Mon cœur a banni tout amour, car un autre que le tien m’est interdit. Tu es pour moi esprit et vin, tu es la rose et le parfum, tu es toute joie et tout souci, guérison et maladie. Et couronnant désir après désir, en toi on trouve une paix. »

La lecture de ses œuvres donne valeur à l’expérience : un de ses disciples raconte qu’il l’a vu dans le souk pleurer et crier :
« Ô gens, sauvez-moi de Dieu. Car Il m’a ravi à moi-même, et Il ne me rend pas à moi-même.
Quant à moi, voici qu’il n’y a plus de voile entre Lui et moi, pas même un clin d’œil, le temps que je trouve le repos, afin que mon humanité périsse en Sa divinité, pendant que mon corps se consume aux flammes de Son omnipotence : pour qu’il n’en reste plus ni trace, ni vestige, ni description. »
Qasida II

« Pour la science, il y a des vocations ;
Pour la foi, une progression ;
Et pour les sciences comme pour
Les savants, il y a des expériences.

Pour moi l’orphelin, j’ai un Père en qui j’ai recours.
Les preux « ahl al Kahf »
Savent ce que je sais, ce sont mes compagnons,
Car celui qui est doué de vertus
S’associe de compagnons. »

Et, pour terminer : « Je suis le Vrai ! Et le vrai, est rendu vrai par le Vrai, j’ai revêtu son essence, plus de séparation désormais. » Tous ces textes expliquent, amènent le fameux « Ana al haqq » de Hallâj (je suis la Vérité, je suis Dieu). Ou je suis le réel Vrai, c’est-à-dire Dieu, qui sera condamné par la suite comme un inadmissible péché d’orgueil. Affirmation, qui, si elle ne doit être rendue publique, n’est pas incongrue dans le milieu soufi dans lequel le mystique est « fondu » dans l’« océan de la divinité », et qui renverrait à un rang spirituel élevé. Les traductions de Louis Massignon viennent appuyer cette thèse, la plupart des versets du Diwan de Hallaj traitant de la science de l’Unité (Tawhid).

Source: Faydatidianiya.com